Get Adobe Flash player
4000776
Today
Total :
2876
4000776

Session du Groupe Cardiologie Tropicale de la Société Française de Cardiologie

MODERATEURS : EDMOND BERTRAND, FRANCE – SERIGNE ABDOU BA, SENEGAL

La session de cardiologie tropicale des Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie (Paris, 13-16 janvier 2016), présidée par les Professeurs Serigne Abdou Ba (Dakar) et Edmond Bertrand (Carpentras) avait pour thème « cardiopathies en Afrique subsaharienne.

 

LE CŒUR D’ATHLETE EN AFRIQUE

A KANE, DAKAR

Le Pr Abdoul Kane (Dakar) a présenté les aspects particuliers du cœur d’athlète chez l’Africain. Cette entité, qui peut prêter à confusion avec les aspects parfois trompeurs des cardiomyopathies hypertrophiques ou dilatées, avec les atypies de l’électrocardiogramme, les conséquences d’un trait drépanocytaire, est de diagnostic difficile chez l’Africain, les critères diagnostiques de l’ECG normal ou pathologique ayant été établis chez des sujets « caucasiens » uniquement.

Parler d’athlète suppose quelques prérequis : plus de 6 heures d’entrainement hebdomadaires, à plus de 60% de la VO2 max, dans un esprit de performance.  Les aspects anatomiques du cœur de l’athlète africain, observées en échocardiographie, diffèrent peu ou pas de ceux des autres ethnies, oreillette gauche plus large,  ventricule gauche plus large, épaisseur pariétale supérieure. La fréquence de repos est plus élevée chez l’athlète africain que chez le non africain.

Les aspects ECG de l’athlète africain diffèrent de ceux des athlètes d’autres ethnies (Tableau 1).

L’un des apspects particuliers observés chez l’athlète africain est le sus-décalage de ST convexe observé à l’exercice, plus marqué. Les QRS amples ou l’aspect convexe du sus décalage de STavec T négatif diphasique de V1 actuelle, le dépistage échographique de la CR demeure du domaine de la recherche mais pourrait devenir un outil de prévention dans les années à venir.

à V4 ne sont pas implicitement pathologiques, alors que les ondes T négatives seules en  latéral le sont. Le même schéma d’orientation s’applique à l’interprétation des trabéculations ventriculaires gauches observées en échographie -18,3% chez l’athlète africain versus 7% chez le non africain. Seules celles associées à des ondes T négatives en latéral isolées sont pathologiques, les autres ne l’étant probablement pas.

Vers des recommandations africaines en cardiologie du sport ? (F Carré, Rennes)

Les recommandations sur la cardiologie du sport élaborées par l’ESC (Eur Heart J 2005 ; 25 :1422) et l’ACC (J Am Coll Cardiol 2005 ; 45 : 1312) sont en cours d’actualisation (2015 pour l’ACC et 2016 pour l’ESC), mais elles ne prennent pas en compte les aspects spécifiques du sport chez l’Africain. Du fait du risque majeur que représente la mort subite du sportif, et que la majorité des contrindication au sport sont d’ordre cardiovasculaire, l’examen du système cardiovasculaire est au centre de la consultation de non-contrindication du sportif, dont le risque relatif est double de celui du non sportif.

Les différents consensus d’experts ont élaboré des recommandations qui ont une valeur sur le risque absolu mais pas de valeur sur le risque individuel, ce qui laisse, dans le cadre de ces consultations, une place importante au bon sens et à l’expérience personnelle. L’intérêt de recommandations africaines tient à la place du sport en Afrique et des Africains dans le sport international. Le sport intense peut être source de problèmes dans les maladies génétiques cardiaques et les cardiopathies congénitales, la maladie coronaire, la drépanocytose et le paludisme, mais aussi du fait des facteurs environnementaux tels que la chaleur, l’altitude, l’humidité, et de facteurs socio-culturels, tels que le jeune. Certains points logistiques limitent la reconnaissance des affections cardiovasculaires chez le sportif africain, l’absence d’IRM cardiaque par exemple, mais aussi la faible connaissance des risques cardiaques et des cardiopathies par les populations. Les pourcentages de cardiomyopathies hypertrophiques et d’anomalies de naissance coronaire retrouvés

au décours d’une mort subite chez un sportif sont plus élevés chez l’Africain que chez le non Africain (20% vs 10% et 10% vs 5%, respectivement). Les athlètes présentant un trait  drépanocytaire  sont  exposés  à un risque

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

accru de collapsus cardiovasculaire en cas de chaleur importante, de deshydratation, de compétition en altitude. Le trait drépanocytaire n’est pas une contrindication au sport, mais doit faire tenir compte des facteurs de risque que sont la reprise de l’entrainement, de la chaleur, de la déshydratation (à prévenir) et de l’altitude. Le paludisme ou les antécédents ne sont pas une contrindication en soi, mais il faut prendre garde à l’effet des antipaludéens sur la repolarisation au décours d’une crise.  

CARDIOPATHIES DU DIABETIQUE EN AFRIQUE

 EDVINE WAWO, Cameroun

Alors que les maladies cardio-vasculaires deviennent rapidement la première cause de décès en Afrique, il est inquiétant de constater la progression de leurs facteurs de risque dont le diabète s’avère un de ceux là.  

Celui-ci justifie d’un nombre de décès important, le diabète devenant la 3ème cause de décès dans le monde .La prévention, le diagnostic, le contrôle de l’évolution vers les complications et le traitement  restent un défi majeur à l’échelle planétaire.

L’Afrique n’est guère épargnée, tout au contraire, avec une prévalence actuelle de la maladie la mettant au top 10 des causes de décès dans ce continent.

L’atteinte cardiaque se trouve être là première cause de décès chez le patient diabétique. Elle consistera principalement à une atteinte vasculaire coronarienne ou alors à une entité  spécifique du diabète décrite voilà quelques décennies : la cardio myopathie spécifique du diabète. L’association à d’autres facteurs de risque ou autres comorbidités vont précipiter ou aggraver le devenir de ces patients qui évolueront vers une insuffisance cardiaque. Celle-ci sera systolique ou diastolique  (apanage de la cardio myopathie diabétique).

La présentation clinique, les bilans et la prise en charge  thérapeutique sont les mêmes que décrits dans les autres éthologies d’insuffisance cardiaque.

Malheureusement, en Afrique, les données épidémiologiques de la cardiopathie du diabétique sont parcellaires et la recherche dans le domaine reste embryonnaire.

Il ressort néanmoins de quelques données de littérature, que les 2 principales entités, coronaropathie et dysfonction diastolique sur cardio myopathie diabétique, sont bien représentées dans cette partie peu nantie du globe.

De ces faits, une attention particulière devra être portée au diabète mais surtout à la cardiopathie du diabétique Africain, première cause de décès chez ces patients vulnérables.

 

CARDIOPATHIES ET FIBRILLATION ATRIALE EN AFRIQUE

 

Pr  COULIBALY IKLO, Côte d’Ivoire

 

Les pays africains  dans leur grande majorité doivent faire face aujourd’hui plus qu’à une transition épidémiologique à une double charge épidémiologique. Alors qu’ils ploient encore sous le fardeau des maladies transmissibles, ils sont confrontés à une explosion de pathologies métaboliques (Hypertension artérielle,  sédentarité,  obésité etc…) consécutives à l’adoption de nouveaux  modes de vie. Tout cela résultant en l’apparition de pathologies cardiovasculaires dont l’une des complications les plus fréquentes est la fibrillation auriculaire.

Il s’agit du trouble du rythme le plus fréquent  dans le monde et qui constitue un facteur de risque  majeur de survenue des AVC ischémiques. En  Afrique même si sa prévalence est faiblement rapportée  sa gravité potentielle semble tout aussi alarmante tant il est avéré que 15 à 30 % des AVC peuvent être liés à la fibrillation auriculaire.

Les patients africains présentant une fibrillation auriculaire sont plus jeunes que ceux d’autres parties du monde avec une plus forte proportion d’hypertension artérielle et de valvulopathies rhumatismales.

La  fibrillation auriculaire permanente  et l’insuffisance cardiaque semblent constituer les principaux modes de présentation de cette affection  comparativement aux patients occidentaux.

Au plan thérapeutique  la stratégie de contrôle de la fréquence cardiaque constitue  l’option majoritaire pour  les médecins africains en charge de cette arythmie. La prescription d’anticoagulants (surtout  anticoagulation orale par AVK indispensable à la prévention des complications thromboemboliques)  est par ailleurs très faible et de mauvaise qualité. A peine le tiers des patients justiciables d’une anticoagulation y sont soumis. Par ailleurs moins de la moitié des patients sous anticoagulants (AVK) présentent des niveaux d’INR (International Normalized Ratio) dans les zones thérapeutiques requises.  Cela expose  les patients aussi bien au risque de complications thromboemboliques  qu’aux risques  d’hémorragies majeures qui viennent en rajouter au pronostic déjà sombre d’une arythmie dont la prévalence est appelée à croître dans les années à venir.

L’alternative aujourd’hui est apportée par les anticoagulants oraux directs (AOD)  qui ont l’avantage de ne pas nécessiter de monitorage systématique mais dont l’usage est freiné par leur coût dans des pays marqués par une rareté de ressources.

Dans un tel contexte il est urgent d’entreprendre  des actions préventives  afin de juguler voire de ralentir la progression des deux grands pourvoyeurs de fibrillation atriale que sont la maladie rhumatismale et l’hypertension artérielle.

 

Photo du groupe Cardiologie Tropicale à Paris.