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Aspects épidémiologiques, cliniques, paracliniques, thérapeutiques et évolutifs des accidents vasculaires cérébraux au Centre Hospitalier Universitaire la Renaissance de N’Djamena – Tchad. (2)

 

Epidemiological, clinical, paraclinical, therapeutic and pronostic aspects of strokes at the Renaissance University Hospital of N’Djamena –Chad.

 

 

M ALI1,6, N DOOUNE1, ZA ZAKARIA2, A KABORE1, YC KESSELI3,6, F SAKADI4, AM BAHAR5

 

 

RESUME

 

Introduction : La prise en charge des accidents vasculaires cérébraux(AVC) au Tchad et dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne demeure un defi. L'objectif de ce travail était de décrire les caractéristiques épidémiologiques, cliniques, paracliniques, thérapeutiques et évolutives des AVC au Centre Hospitalier Universitaire la Renaissance (CHU-R) de N’Djamena.

Patients et méthodes : Il s’agissait d’une étude transversale descriptive sur 5 ans incluant tous les dossiers des patients traités au CHU-R pour AVC confirmé au scanner cérébral. Les thromboses veineuses cérébrales et les hémorragies sous-arachnoïdiennes étaient exclues.

Résultats : Au total 186 dossiers étaient inclus dont 129 hommes (69,35%) l’âge moyen était de 58,41±13 ans. La fréquence hospitalière des AVC était de 16,31%. L’hypertension artérielle (HTA) était le principal facteur de risque cérébro-vasculaire (92,47%, n=172). Le délai d’admission était supérieur à24 heures chez 54,30% des patients (n=101). L’hémiplégie était le principal motif de consultation (64,52%, n=120).L’AVC ischémique était prédominant (66,13%, n=123) avec comme étiologie les cardiopathies emboligènes (16,66% (n=31) au rang desquelles 67,74% (n=21) étaient des fibrillations auriculaires. La durée moyenne de séjour des patients était 9,2 ± 5 jours. La mortalité hospitalière était de 17,20%(n=32).

Conclusion : Près d’un patient sur 6 admis aux urgences et en cardiologie souffre d’AVC et va en décéder. L’HTA doit être dépistée et traitée systématiquement afin de réduire l’impact des AVC dans notre contexte.

 

 

MOTS CLES

 

Accident vasculaire cérébral, N’Djamena, Tchad.

 

 

SUMMARY

 

 

Introduction: The management of strokes in Chad and in several countries in sub-Saharan Africa remains a challenge. The objective of this work was to describe the epidemiological, clinical, paraclinical, therapeutic and prognostic aspects of stroke at the Renaissance University Hospital (R-UH) in N'Djamena.

Patients and methods: This was a descriptive cross-sectional study over 5 years including all the records of patients treated at the CHU-R for stroke confirmed by brain scan. Cerebral venous thrombosis and subarachnoid hemorrhages were excluded.

Results: A total of 186 files were recorded including 129 men (69.35%). The average age was 58.41±13 years. The hospital frequency of strokes was 16.31%. Arterial hypertension (HTA) was the main cerebrovascular risk factor (92.47%, n=172).Admission time was greater than 24 hours in 54.30% of patients (n=101). Hemiplegia was the main reason for consultation (64.52%, n=120).Ischemic stroke was predominant (66.13%, n=123) with embolic heart disease as etiology (16.66% (n=31) among which 67.74% (n=21) were atrial fibrillation. The average length of stay for patients was 9.2± 5 days. Hospital mortality was 17.20% (n=32).

Conclusion: Nearly one in six patients admitted to the emergency room and cardiology suffers from a stroke and will die from it. Hypertension must be detected and treated systematically in order to reduce the impact of strokes in our context.

 

 

KEY WORDS

Stroke, N’Djamena, Chad.

 

 

                                                                                                                       

1 Service de Cardiologie, CHU la Renaissance, BP. 2029 N’Djamena – Tchad

Service de Cardiologie, CHU la Référence Nationale,  BP. 130 N’Djamena – Tchad

Service de Neurochirurgie, CHU la Renaissance, BP. 2029 N’Djamena – Tchad

Service de Neurologie, CHU la Référence Nationale,  BP. 130 N’Djamena – Tchad

Service des Urgences, CHU la Renaissance, BP. 2029 N’Djamena – Tchad

Adresse pour correspondance 

Adam Ahamat ALI

Cardiologue au CHU la Renaissance de Ndjamena

BP : 2029

Tel : 00 235 62 09 03 08

Email : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. .

 

 

INTRODUCTION

 

L’accident vasculaire cérébral (AVC) est caractérisé comme un déficit neurologique attribué à une lésion focale aiguë du système nerveux central (SNC) par une cause vasculaire, comprenant l’ischémie cérébrale, l’hémorragie intracérébrale et l’hémorragie sous-arachnoïdienne [1].C’est un problème de santé publique majeur, car ce sont des pathologies fréquentes, greffées de mortalité élevée et des handicapes fonctionnels[2].Ils représentent la deuxième cause de mortalité dans le monde derrière les cardiopathies et devant les maladies infectieuses [3].

En Afrique subsaharienne, la prévalence des AVC semble en croissance et variable selon les pays avec un taux brut de 387,9/100 000 habitants [4, 5, 6, 7].Ils touchent des sujets relativement jeunes, porteurs de facteurs de risque notamment l’hypertension artérielle (HTA), les valvulopathies rhumatismales et la fibrillation auriculaire [7, 8].La prise en charge des AVC au Tchad et dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne demeure un challenge. Le taux de mortalité est élevé avec plus de 30 % des décès à un mois [8]. Cette surmortalité peut être liée au retard diagnostic, thérapeutique, l’insuffisance de plateau technique et à la difficulté d’accès aux soins dans notre contexte subsaharien [9].La prévention primaire et secondaire des facteurs de risque cardiovasculaire (hypertension artérielle « HTA », tabagisme, diabète…etc.) permet de réduire l’incidence des AVC [10].

L'objectif de notre travail était de décrire les caractéristiques épidémiologiques, cliniques, paracliniques, thérapeutiques et évolutives des AVC chez un groupe de patients au Centre Hospitalier Universitaire la Renaissance (CHU-R) de N’Djamena pour avoir des données factuelles pouvant nous aider à développer des stratégies de santé publique pour limiter le fardeau des AVC dans notre milieu.

 

 

PATIENTS ET METHODES

 

 

Caractéristiques de l’étude

 

Il s’agissait d’une étude transversale descriptive qui s’était déroulée du 1er janvier 2015 à 1erjanvier 2020 dans les services des urgences et de cardiologie du CHU-R.

L’équipe de service des urgences est composée de sept (7) médecins dont cinq (5) généralistes, un urgentiste et anesthésiste-réanimateur, et de vingt-deux (22) paramédicaux. Ce service dispose trois (3) salles d’examen, une unité d’hospitalisation de courte durée avec cinq (5) lits et une salle de déchocage avec 02 lits. Les imageries cérébrales disponibles sont le scanner 16 barrettes et l’imagerie par résonnance magnétique 0,3 Tesla.

Le service de cardiologie est constitué de douze (12) lits d’hospitalisation et quatre (4) lits de soins intensifs cardiologiques. L’équipe est composée de trois (3) cardiologues et un neurologue, et 12 paramédicaux. Ce service dispose d’un plateau technique composé d’un électrocardiogramme « ECG », d’une échographie cardiaque, des holters tensionnel et ECG, et d’un test d’effort.

 

Caractéristiques de la population d’étude

 

Critères d’inclusion 

 

Tous les patients hospitalisés pour AVC confirmé par le scanner cérébral (HITACHI-ECLOS-16 barrettes-2013) et âgés de plus de 15 ans.

Critères d’exclusion : les dossiers incomplets ou inexploitables, les thromboses veineuses cérébrales et les hémorragies sous-arachnoïdiennes étaient exclus.

 

Considérations éthiques 

 

L’étude a été préalablement autorisée (N°085/PR/MESRI/SG/U-NDJ/FSSH/2020) par le comité d’éthique de la Faculté des Sciences de la Santé Humaine et de la direction générale du CHU-R. Les données ont été traitées avec confidentialité en respectant les exigences de la déclaration d’Helsinki II.

Procédure de collecte des données

 

Les données ont été recueillies à l’aide des fiches de collecte préétablies. Tous les patients avaient bénéficié d’un électrocardiogramme, d’une échographie cardiaque (échographe Mindray DC-6) et d’un bilan biologique comportant numération sanguine, créatininémie, glycémie, cholestérol, triglycéride, sérologie du virus de l’immunodéficience humaine(VIH). L’écho Döppler des troncs supraoptiques (TSA) a été réalisée chez les patients présentant un AVC ischémique.

 

Les données collectées

 

Sociodémographiques : âge, sexe, profession,

Comorbidités : HTA, diabète, tabagisme, obésité, hypercholestérolémie, consommation d’alcool, insuffisance rénale chronique (débit de filtration glomérulaire<60 ml/min/1,73 m2 « IRC »), antécédents d’AVC, valvulopathie, cardiomyopathie dilatée (CMD), fibrillation auriculaire.

 

Cliniques

 

 Délai d’admission, motifs de consultation, la topographie du déficit neurologique, l’existence ou non de troubles du langage.

Électrocardiographiques : Troubles du rythme notamment la fibrillation auriculaire ou de la conduction, anomalies de la repolarisation.

 

Échocardiographiques 

 

 Dilatation des cavités cardiaques, hypertrophie de parois, dysfonction diastolique du ventricule gauche (VG), anomalies de la cinétique ventriculaire gauche, altération de la fraction d’éjection systolique du VG (FEVG< 45%), anomalie valvulaire.

 

Scannographiques 

 

 Type de l’AVC, territoire artériel.

 

 

 

Traitements reçus pendant l’hospitalisation 

 

Les patients étaient accueillis au niveau des urgences où on évaluait l’état clinique et les paramètres vitaux.

 

Mesures thérapeutiques globales pour tous les types des AVC

 

 L’oxygénothérapie (si la saturation à l’air ambiante est inférieure à 95 %), l’administration de paracétamol à raison de 1 g toutes les 6 h en cas de fièvre (température supérieure à 37,5°C) ou des céphalées, d’oméprazol 20 mg (systématique) et un protocole d’insuline rapide si la glycémie capillaire supérieure à 1,8 g/L.

Pendant la phase aigüe, l’HTA a été prise en charge par la nicardipine par voie intraveineuse via une seringue électrique si la pression artérielle (PA) est supérieure à 220/120 mmHg en cas d’AVC ischémique avec un objectif, PA inférieure ou égale à 185/110 mmHg. Pour l’AVC hémorragique, la PA cible était inférieure à 160/100 mmHg. Ensuite, chez les patients hypertendus, le relais était assuré par des antihypertenseurs per os (inhibiteurs calciques, inhibiteurs de l'enzyme de conversion, diurétiques thiazidiques, antagonistes des récepteurs de l'angiotensine 2, centraux).

 

Traitement spécifique pour les AVC ischémiques

 

L’aspirine a été utilisé chez tous les patients à la posologie de160 à 300 mg/j, l’anticoagulation préventive par enoxaparine 40 mg administrée selon la présence d’un risque thromboembolique élevé ou un risque de transformation hémorragique faible et anticoagulation curative (enoxaparine dans, héparine sodique ou calcique) en cas de cardiopathie emboligène (thrombus intracavitaire, fibrillation auriculaire valvulaire, prothèse valvulaire mécanique, sténose mitrale). Un traitement par voie orale à base des antivitamines K et des anticoagulants oraux directs a été prescrit en relais.

Traitement spécifique pour les AVC hémorragiques : le mannitol 20 % administré à la dose de 40 g, évacuation chirurgicale de l’hématome intracrânien.

Les statines étaient utilisées chez les patients athéromateux ou présentant une dyslipidémie.

Les infections bactériennes étaient traitées par des antibiotiques et le paludisme par l’artéméther et l'artésunate.

La kinésithérapie motrice a été instaurée dès la phase hospitalière (après 24 heures) chez les patients stables cliniquement.

 

Evolution du patient en cours d’hospitalisation et la durée d’hospitalisation.

 

Analyses statistiques

 

Le logiciel SPSS 18.0a servi de base à l’analyse des données. Les variables quantitatives étaient exprimées en moyenne ± écart-type, tandis que les variables qualitatives étaient présentées sous-formes de pourcentages.

 

 

 

RESULTATS

 

 

Fréquence

 

Au cours de la période d’étude, 1140 dossiers des patients hospitalisés pour des pathologies cardiovasculaires ont été colligés dont 186 cas d’AVC soit une fréquence de 16,31%.Le scanner n’a pas été réalisé chez 36 patients.

Caractéristiques générales de la population d’étude

La population d’étude était constituée majoritairement des hommes (69,35%, n=129) donnant un sex ratio de 2,23.L’âge moyen était de 58,41±13 ans avec des extrêmes de 19 ans et 91 ans. Près du tiers des patients étaient des fonctionnaires (31,72%, n=59), 26,34% sans emploi (n=49), 17,20% des retraités (n=32) et 10,75 des particuliers (n=20).Les principaux antécédents étaient les cardiopathies emboligènes (16,66%, n=31) et les AVC (15,59%, n=29).L’infection par le VIH a été retrouvée chez 16 patients (8,60%, n=16). Tous étaient connus et traités par des antirétroviraux.

Les principaux facteurs de risque cardiovasculaires étaient l’HTA (92,47%, n=172), le diabète (46,24%, n=86), la dyslipidémie (40,32%, n=75) et l’obésité (31,18%, n=58). Les caractéristiques des patients sont répertoriées dans le tableau 1.

 

Profil clinique

 

Le délai d’admission était supérieur à 24 heures chez 54,30% des patients (n=101). Les motifs de consultation les plus fréquents étaient le déficit d’un hémicorps (64,52%, n=120) dont 49 cas d’hémiplégie gauche (41%), les troubles du langage (dysarthrie/Aphasie) (25,27%, n=47), les troubles de la conscience (16,66%, n=31) et les vertiges (16,13%, n=30).La répartition des patients selon les données cliniques est présentée dans le tableau 2.

 

Données paracliniques (tableau 3)

 

Les anomalies électrocardiographiques étaient, les troubles de repolarisation atypiques (24,73%, n=46), l’hypertrophie ventriculaire gauche (14%, n=26), la fibrillation auriculaire (11,29%, n=21) et les extrasystoles auriculaires (7,53%, n=14).Á l’échographie cardiaque, les anomalies morphologiques les plus rencontrées étaient l’hypertrophie des parois (41,40%, n=77) et la dilatation des oreillettes (20%, n=37). L’altération de la FEVG (<45%) était constatée chez 11 patients (6%).

Sur les 65 échographies Döpplers des troncs supraoptiques réalisées, 55 patients présentaient une surcharge athéromateuse au niveau des bifurcations carotidiennes (84,61%). La sténose de sténose serrée de l’artère carotide interne était retrouvée dans 3,07% des cas (n=2).

L’AVC ischémique était rencontré chez 123 patients (66,13%) avec l’artère sylvienne concernée dans 106 cas (57%).Parmi les 63 cas (33,87%) d’AVC hémorragique, les noyaux gris centraux étaient la localisation de l’hématome dans 12,36% (n=23).

 

Thérapeutiques et évolution (tableau 4)

 

Sur le plan thérapeutique, tous les AVC ischémiques avaient bénéficié d’un traitement médical à base de l’Aspirine 100 mg. L’usage de l’anticoagulation était au cas par cas (risque de transformation hémorragique faible, cardiopathies emboligènes ou autres facteurs de risque thromboembolique), l’enoxaparine dans 73,17% des cas (n=90), héparine sodique et calcique dans 30,10% des cas (n=37), antivitamine K dans 21,14% des cas (n=26) et rivaroxaban dans 6% des cas (n=7).

Parmi les 63 AVC hémorragiques (33,87%), 10 patients (16%) avaient bénéficié d’une évacuation-drainage de l’hématome intracrânien dont 7 à l’aide d’une dérivation ventriculaire externe et 3 à l’aide d’une craniotomie.

Les traitements antihypertenseurs ont été prescrits pour 172 patients (92,47%), les inhibiteurs calciques étaient majoritairement utilisés, 50,58% des cas (n=87), suivis des inhibiteurs de l'enzyme de conversion, 33,14% des cas (n=57), et des diurétiques thiazidiques, 8,14% des cas (n=14). Pendant la phase hospitalière, chez 140 patients (75,27%) avaient bénéficié d’une kinésithérapie motrice (24 heures après l’hospitalisation).

La durée de séjour hospitalier variait de 1 à 30 jours avec une moyenne de 9,2 ± 5jours.Le décès en hospitalisation était de 17,20% des cas (n=32).

Á la sortie de l’hôpital, 53/154 patients avaient récupérés totalement (34,42%) et 101 patients avaient des séquelles (65,58%). Les séquelles observées étaient respectivement, hémiplégie, 88,12% des cas (n=89), la dysarthrie, 18% des cas (n=18), incontinence urinaire, 8% des cas (n=8) et dysfonction érectile, 4% des cas (n=4).

 

 

DISCUSSION

 

 

Dans cette étude, la prévalence hospitalière était de 16,31%.Ce taux de fréquence hospitalière est inférieur à ceux rapportés par Kouna Ndouongo et al en 2007 au Gabon, 42,9% [7]et Balogou et al en 2008 au Togo, 32,9% [11].Cette différence suggère une sous-estimation probable vue les difficultés liées à l’accès de l’imagerie cérébrale dans notre contexte.

Le sexe masculin était prédominant avec 69,35%. En Afrique, la prévalence selon le sexe est variable. La majorité des études ont montré une prédominance masculine [7, 11, 12].Cela pourrait s'expliquer en partie par la protection hormonale dont bénéficie la femme avant la période de la ménopause [13].L’âge moyen des patients était de 58, 41±13 ans. Résultat proche de ceux rapportés par plusieurs auteurs africains [14,15, 16]. L’âge moyen de survenue des AVC est plus élevé en France avec 70,4 ans chez l’homme et 76,7 ans chez la femme [17].Près de 1/3 des patients étaient des fonctionnaires (31,72%). Cela peut être lié à l’accès aux soins dont bénéfice cette catégorie de la population.

Les facteurs de risque majeurs étaient dominés par l’HTA (92,47%,) suivi du diabète (46,24%) et de la dyslipidémie (40,32%). Dans une étude en Afrique subsaharienne regroupant plusieurs pays, l’HTA est le principal facteur de risque cardiovasculaire retrouvé chez les patients présentant un AVC [18]. D’autres auteurs africains ont fait le même constat, montrant ainsi l’HTA comme le principal facteur de risque. D’autres facteurs de risque sont aussi impliqués comme le diabète, la dyslipidémie et le tabagisme [11, 14, 19].

Nous avons constaté près de 17% des cas de cardiopathies emboligènes dont 67,74% des fibrillations auriculaires. Gnonlonfoun et al en 2017 au Bénin ont observé des résultats proches avec 26% des cas des cardiopathies emboligènes avec une prédominance de fibrillation auriculaire (82%) [20]. Mapoure et al en 2019 au Cameroun ont rapportés que la fibrillation auriculaire était la principale étiologie des AVC ischémique avec 82,1 % des cas [21].

Les données épidémiologiques américaines ou européennes ont montré que la fibrillation auriculaire était l’arythmie cardiaque la plus fréquente, en particulier chez les sujets âgés ou porteurs de cardiopathie [22-24].Elle augmente le risque d’AVC et les données de la littérature indiquent également qu’elle est responsable d’un sur-risque d’AVC fatals [25-28].Les récidives d’AVC ont été notées dans 15,59% des cas. Sissoko et al en 2020, Ont trouvé de résultat similaire (15,78%) dans une étude menée à Bamako sur les récidives d’AVC [29].

L’infection par VIH a été observée chez 8,60% de nos patients. Hoffmann et al en 2000 en Afrique du Sud avaient trouvé un taux plus élevé d’infection par VIH associée aux AVC (16%) [30].Au Cameroun, le taux d'incidence était de 0,3 pour 100 personnes-années [31].Cette disparité des résultats peut être liée à méthodologie et l’échantillon de différents types d’études. En 2020, la prévalence de l’infection par VIH était de 1,2 % au Tchad et de 4% à N’Djamena (ONUSIDA). D’autres études seront nécessaires pour déterminer l’incidence des AVC dans cette population.

Dans cette série, le délai d’admission était long. Plus de la moitié de nos patients s’étaient présentés au-delà de 24 heures (54,30%).Dans la série togolaise de 2008, la majorité des patients (55%) a été admise avant la 6ème heure après le début des signes [11]. Cela montre le manque de sensibilisation dans notre milieu. Les motifs de consultation étaient dominés respectivement ; par le déficit hémicorporel (64,52%), les troubles du langage (25,27%), les troubles de la conscience (16,66%) et les vertiges (16,13%). Ce sont des signes classiques des AVC décrits dans la littérature [7, 11, 14, 32].

Les AVC ischémiques étaient prépondérants dans notre étude, 66,13% des cas et les AVC hémorragiques, 33,87% des cas. En effet, plusieurs auteurs en Afrique [11, 14, 18, 27] et en Europe [12, 33] ont montré cette fréquence des AVC ischémiques. Cependant, nous pensons que ce constant est relatif. Car la généralisation de scanner dans notre environnement pourrait changer cette tendance. Parmi les patients ayant présenté un AVC hémorragique, 16% avaient bénéficié d’une évacuation-drainage de l’hématome intracrânien en urgence. C’est une avancée pour notre pays car cette spécialité n’existait même pas il y’a quelques années.

La durée moyenne de séjour des patients hospitalisés était 9,2± 5 jours. Ce résultat est inférieur aux résultats rapportés par certains auteurs d’autres pays [11, 17, 34]. Cela pourrait être la conséquence du coût élevé d’hospitalisation   dans    notre   établissement.

 

Á la sortie de l’hôpital, 65,58% des patients gardés des séquelles particulièrement l’hémiplégie (88,12%). Cependant, ces séquelles nous posent un problème majeur dans notre contexte. Car l’autonomisation et la réinsertion sociale reste très difficiles par manque de ressources humaines et de centres de rééducation fonctionnelle. La mortalité hospitalière était de 17,20%.Des auteurs africains ont retrouvé des données similaires avec un taux de létalité plus élevé en cas d’AVC hémorragique [11, 14]. Les facteurs prédictifs de la mortalité durant l’hospitalisation rapportés par Mapoure et al en 2014 au Cameroun étaient, le score de Glasgow inférieure à 8/15, l’hyperglycémie et le caractère hémorragique de l’AVC [35].

La création des unités neurovasculaires pourrait considérablement améliorer le pronostic des AVC.

Cette étude malgré son faible échantillonnage, son caractère monocentrique et rétrospectif, nous a permis d’identifier le profil clinique, thérapeutique et évolutif des AVC au CHU-R.

Notre pays devrait mettre l’accent sur les programmes de sensibilisation sur les AVC, le dépistage des facteurs de risque et leur prise en charge, la facilitation de l’accès à l’imagerie cérébrale. La mise en place des protocoles des soins à évaluer pourra faciliter la prise en charge des malades le temps de mettre en place d’unités neurovasculaires.

 


 

 

CONCLUSION

 

 

Cette étude suggère qu’un patient sur 6 admis aux urgences et en Cardiologie souffre d’AVC et va également décéder en hospitalisation. Le dépistage et la prise en charge des facteurs de risque cérébro-vasculaires pourront permettre de réduire l’impact l’incidence des AVC dans notre contexte.

 

 

Tableau 1

Caractéristiques sociodémographiques des patients

 

 

Paramètres

Nombre (n=186)

Pourcentage (%)

Sexe :

Femme

Homme

 

57

           129

 

30,64

69,35

Age (ans) :

< 20 ans

20-39 ans

40- 59 ans

60- 79ans

plus de 80 ans

 

  3

12

83

78

10

 

   1,61

   6,45

44,62

41,93

  5,37

Profession :

Fonctionnaires

Particuliers

Retraités

Sans emploi

Autres

 

59

20

32

49

26

 

31,72

10,75

17,20

26,34

               14

Antécédents :

Accident ischémique transitoire

AVC

Cardiopathie emboligènes

VIH

 

  7

29

31

16

 

  3,76

15,59

16,66

  8,60

Facteurs de risque cardiovasculaire :

HTA

Diabète

Tabagisme

Obésité

Dyslipidémie

Alcoolisme

IRC

 

           172

86

52

58

75

49

29

 

92,47

46,24

               28

31,18

40,32

26,34

               16

 

 

Tableau 2

Répartition des patients selon les données cliniques

 

Paramètres

Nombre (n)

Pourcentage (%)

Délai d’admission :

< 6 heures

6 - 24 heures

> 24 heures

 

41

44

         101

 

22,04

23,65

54,30

Motifs de consultation :

Céphalée

Vertige

Syncope

Déficit hémi corporel

Paralysie faciale

Trouble de la conscience

Dysarthrie/Aphasie

 

21

30

14

         120

27

31

47

 

11,29

16,13

  7,53

64,52

14,52

16,66

25,27

 

 

Tableau 3

Données de l’électrocardiogramme, de l’échocardiographie,

de l’écho-doppler des troncs supraoptiques et scanner cérébral

 

Paramètres

Nombre (n)

Pourcentage (%)

Électrocardiogramme :

Hypertrophie ventriculaire gauche

Extrasystoles auriculaires

Trouble de repolarisation atypiques

Fibrillation auriculaire

 

26

14

46

21

 

               14

  7,53

24,73

11,29

Échocardiographie :

Hypertrophie des parois

Dilatation des oreillettes

Dilatation du VG

FEVG altérée

Anomalies valvulaires

 

77

37

  6

11

14

 

41,40

               20

   3,22

                  6

    7,53

Echodoppler des troncs supraoptiques :

Surcharge athéromateuse

Sténose carotide interne modérée

Sténose carotide interne serrée

 

55

  8

  2

 

84,61

12,30

   3,07

Scanner cérébral :

Type de l’AVC

Ischémique

Hémorragique

Territoire artérielle

Artère cérébrale antérieure

Artère Sylvienne

Artère cérébrale postérieure

Artère choroïdienne

Lacunes multiples

 

 

          123

63

 

19

          106

36

  8

17

 

 

66,13

33,87

 

10,21

                57

19,35

   4,30

    9,14

 

 

Tableau 4

Données thérapeutiques et évolutives

 

Paramètres

Nombre

Pourcentage (%)

Traitement

AVC ischémique (123 cas)

Aspirine

Enoxaparine

Héparine (sodique, calcique)

Antivitamine K

Rivaroxaban

AVC hémorragique (63 cas)

Évacuation-drainage de l’hématome

Dérivation ventriculaire externe

Craniotomie.

 

 

      123

90

37

26

  7

 

10

  7

  3

 

 

          100

73,17

30,10

21,14

              6

 

             16

             11

5

Traitements antihypertenseurs (172 cas)

Inhibiteurs calciques

Inhibiteurs de l'enzyme de conversion

Diurétiques thiazidiques

Antagonistes des récepteurs de l'angiotensine 2

Centraux

 

87

57

14

12

  2

 

 50,58

 33,14

   8,14

               7

   1,16

Kinésithérapie

      140

75,27

Evolution

Durée d’hospitalisation moyenne (jours)

Récupération totale

Séquelles

Décès

 

         9,2 ± 5

53

      101

32

 

 

34,42

65,58

17,20

 

 

REFERENCES

 

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