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Etude des facteurs de risque cardiovasculaire associés chez le patient hypertendu au District Sanitaire de Bignona (Sénégal).

 

Associated cardiovascular risk factors in hypertensive patients in the health district of Bignona (Senegal).

 

 

M BODIAN1, PG NDIAYE1*, JS MINGOU J1, Y BODIANG1, CMB MBACKE DIOP1, KR DIOP1, Y DIOUF1, SD DIALLO1, S AKANNI1, SA SARR1, M DIOUM2, F AW1, AA NGAIDE3, MB NDIAYE1, M DIAO1.

 

 

RESUME

 

 

Introduction : L’objectif de notre étude était d’évaluer la fréquence de l’hypertension artérielle et des facteurs de risque (FDR) cardiovasculaire associés au niveau du district sanitaire de Bignona.

Méthodologie : Une étude descriptive et transversale a été menée sur une période de douze (12) mois. L’étude portait sur des sujets vus en consultation et hypertendus suivis depuis au moins 03 mois. Les paramètres étudiés étaient les données sociodémographiques, les FDR cardiovasculaire associés à l’HTA, les signes cliniques et paracliniques et les aspects thérapeutiques. Les données avaient été saisies sur plateforme ona.io et analysées grâce au logiciel Stata15.

 

Résultats : Les hypertendus consultés durant la période de l’étude étaient au nombre de 514 dont 102 inclus dans l’étude. La fréquence de l’HTA était de 8,06% avec une prédominance féminine (sex-ratio H/F=0,85). L’âge moyen de la population était de 61,42±10,70 ans. La sédentarité (76,50%), l’obésité abdominale (42,16%) et le tabagisme (36,30%) étaient les FDR cardiovasculaire les plus retrouvés. L’obésité représentait 15,70% de la population avec une nette prédominance féminine (24% contre 6% chez les hommes ; p=0,2). Plus de la moitié des patients soit 53,92% cumulait au moins 3 FDR. Les complications étaient dominées par les cardiopathies hypertensive (35,29%) et ischémique (21,56%). Le risque cardiovasculaire global était élevé dans 61,79% des cas.

Conclusion : L’HTA est fréquemment associée à desFDR cardiovasculaire modifiables, ce qui accroit le risque cardio-vasculaire global, avec comme corolaire des complications précoces et graves.

 

 

MOTS CLES

Hypertension artérielle, facteur de risque cardio-vasculaire, Bignona, Sénégal.

 

 

SUMMARY

 

 

Introduction: The objective of our study was to assess the overall prevalence of arterial hypertension and associated cardiovascular risk factors at the health district of Bignona.

Methodology: A descriptive and cross-sectional study was conducted over a period of twelve (12) months, from January 1, 2019 to December 31, 2019. The study involved hypertensive subjects in consultation, and followed since at least 03 months. The studied parameters were socio-demographic data, cardiovascular risk factors associated with hypertension, clinical and paraclinical signs and therapeutic aspects. The data had been entered on the ona.io platform and analyzed using the Stata15 software.

Results: There were 514 hypertensive patients seen during the study period, 102 among them were included in the study. The prevalence of hypertension was thus 8.06% in our District, with a female predominance (sex ratio M / F = 0.85). The average age of the population was 61.42 ± 10.70 years.

Sedentary lifestyle (76.50%), abdominal obesity (42.16%) and smoking (36.30%) were the most common cardiovascular risk factors. Obesity represented 15.70% of the population with a clear predominance of women (24% versus 6% for men; P = 0.2). More than half of the patients, ie 53.92%, accumulated at least 3 risk factors alongside their hypertension.

Complications were dominated by hypertensive heart disease (35.29%) and ischemic heart disease (21.56%). The overall cardiovascular risk was high in 61.79% of cases.

Conclusion: Our study shows that cardiovascular risk factors are frequently associated with hypertension. This increases the overall cardiovascular risk with the frequency of complications as a corollary.

 

 

KEY WORDS

Arterial hypertension, cardiovascular risk factor, Bignona, Senegal.

 

 

1. Service cardiologie, CHU Aristide le Dantec, Dakar, Sénégal.

2. Service de Cardiologie, Hôpital Fann, Dakar, Sénégal.

3. Service de Cardiologie, Hôpital Général de Grand Yoff, Dakar, Sénégal.

 

Adresse pour correspondance :

Dr Papa Guirane NDIAYE

Service de cardiologie ; Centre Hospitalier universitaire Aristide Le Dantec.

Tel : (+221) 77 377 87 24 ;

Email : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. .

BP : 6633 Dakar Etoile, Sénégal.

 

 

 

INTRODUCTION

 

 

L’hypertension artérielle (HTA) est l’une des affections chroniques graves les plus répandues dans le monde, constituant l’un des principaux facteurs de risque cardiovasculaire [1]. Elle est la cause d’environ huit (08) millions de décès par an [2]. Elle représente un problème majeur de santé publique dans le monde, avec une prévalence de 26,4% [3], concernant plus d’un milliard d’individus à travers le monde, soit un quart de la population mondiale [2, 3]. En Afrique subsaharienne, elle constitue un sujet particulièrement inquiétant. Quatre-vingt millions d’individus étaient affectés en 2000 selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et d’après les projections épidémiques, ces chiffres pourraient atteindre 150 millions d’individus en 2025 [3, 4]. Elle est fréquemment associée à d’autres facteurs de risque cardiovasculaire (l’âge, le sexe, les antécédents familiaux cardiovasculaires, le tabagisme, la dyslipidémie, l’obésité, la sédentarité, les facteurs nutritionnels) et définit avec ces derniers le risque cardiovasculaire du patient [5]. Ceci justifie l’intérêt de l’étude de ces facteurs, devenus de plus en plus important depuis l’enquête de Framingham [6]. Au Sénégal, les quelques études réalisées sur ce fléau mondial avaient concernés les zones Nord et Centre du pays avec presque pas de donnée concernant les zones Sud. Ainsi la réalisation de cette étude en ces zones où les réalités socio-culturelles et climatiques sont un peu différentes est devenue nécessaire. L’objectif général de ce travail était d’évaluer la fréquence de l’hypertension artérielle et des facteurs de risque cardiovasculaire qui lui sont associés au niveau du district sanitaire de Bignona. Les objectifs spécifiques étaient de :

-          Décrire les caractéristiques socio-démographiques de la population ;

-          Déterminer la fréquence de l’hypertension artérielle ;

-          Estimer la fréquence des facteurs de risque cardiovasculaire associés ;

-          Evaluer le risque cardiovasculaire global dans notre population d’hypertendus

 

 

METHODOLOGIE

 

 

Ce travail a été réalisé au centre de santé de Bignona dans la région de Ziguinchor au Sud du Sénégal à 400 km de Dakar. Il s’agissait d’une étude descriptive de type transversal réalisée sur une période de 12 mois, du 1er janvier au 31 décembre 2019. Ont été inclus tous les patients âgés de 18 ans et plus, porteurs d’une HTA essentielle et suivis dans le centre de santé de Bignona, traités depuis au moins 03 mois. L’existence d’éléments cliniques et paracliniques orientant vers une cause potentielle (sténose de l’artère rénale avec l’echoDöppler des artères rénales, phéochromocytome par le dosage des métanephrines et normétanephrines urinaires, hyperthyroïdie avec le dosage des hormones thyroïdiennes…) avait permis d’éliminer les HTA secondaires. Les explorations non disponibles dans le centre de santé ont été faites dans des structures plus relevées.

Nous avons analysé les données socio-démographiques telles que l’âge, le sexe, le niveau d’instruction du patient, la profession et le profil économique. L’HTA, définie par une pression artérielle systolique supérieure ou égale à 140 mm Hg et ou une pression artérielle diastolique supérieure ou égale à 90 mm Hg [7] a été évaluée par les données suivantes : la durée d’évolution, la qualité de vie des patients, la maitrise des chiffres tensionnels sous traitement et l’observance thérapeutique. La cible tensionnelle inférieure à 140/90 mm Hg était requise pour un bon contrôle des patients sous traitement. Les autres facteurs du risque cardio-vasculaire ainsi le mode de vie des patients avaient été recherchés tels que :

Le diabète défini par une valeur de la glycémie à jeun atteignant ou dépassant 1,26 g/l (ou ≥ 7mmol/L) à 2 reprises ou une glycémie supérieure ou égale à 2 g/l (ou ≥ 11,1mmol/L) deux heures de temps après une charge de glucose de 75 g [8].

La dyslipidémie définie par une cholestérolémie totale supérieure à 2 g/l, une cholestérolémie HDL inférieure à 0.36 g/l, une cholestérolémie LDL supérieure à 1,5 g/l ou une triglycéridémie supérieure à 1,5 g/l [9].

La sédentarité définie par une activité physique faible < 180 minutes par semaine ou nulle mais également à un ensemble de comportements au cours desquels la position assise ou couchée est dominante et la dépense énergétique très faible voire nulle [10].

Le surpoids définit par un indice de masse corporelle (IMC) supérieur ou égal à 25kg/m2 et l’obésité par un indice de masse corporelle supérieure ou égale à 30 kg/m2 selon la formule de Quételet : IMC = poids/taille2 [11].

Autres : l’antécédent familial d’hypertension artérielle au premier degré ; le tabagisme actif ou ancien (sevré depuis 3 ans) ; la prise de pilules de contraceptif hormonal chez la femme ; l’exposition à un stress permanent.

Un examen clinique complet avait été réalisé à la recherche de complications et de signes nous orientant vers une étiologie particulière.

La pression artérielle était mesurée par différents médecins aux deux bras à l’aide d’un tensiomètre électronique de marque 0MRON M2. Le patient était en décubitus dorsal au repos pendant quelques minutes. Le brassard est placé à environ deux (02) travers de doigts au-dessus du creux cubital ; ensuite l’appareil était mis en marche. Le résultat était affiché sur l’écran de l’appareil.

L’hypertension artérielle était classée en 3 grades :

-          HTA grade 1 (légère) : PAS comprise entre 140 et 159 mmHg et/ou une PAD entre 90 et 99 mmHg ; 

-          HTA grade 2 (modérée) : PAS comprise entre 160 et 179 mmHg et/ou une PAD entre 100 et 109 mmHg ; 

-          HTA grade 3 (sévère) : PAS supérieure ou égale à 180 mmHg et/ou une PAD supérieure ou égale à 110 mmHg. 

Les paramètres biologiques étudiés étaient le cholestérol total, le cholestérol HDL, le cholestérol LDL, les triglycérides, la glycémie à jeun, la créatinémie et la micro-albuminurie. Le calcul du risque cardiovasculaire s’est fait par deux méthodes : celle de la sommation des facteurs de risque et celle du SCORE de l’ESC [12]. L’électrocardiogramme de repos (12 dérivations) avait été enregistré chez tous les patients, et l’hypertrophie ventriculaire gauche avait été calculée selon les formules de Sokolow-Lyon et de Cornell. Nous avons recherché des complications notamment l’insuffisance cardiaque, les accidents vasculo-cérébraux (AVC), la maladie coronarienne, l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI).

Nous avons utilisé la plateforme ona.io [13] pour l’hébergement de la base de données, le logiciel Stata 15 pour le traitement et l’analyse, et le logiciel Excel pour l’élaboration des tableaux et des graphiques. Le traitement des données a permis de transformer certains indicateurs quantitatifs en indicateurs qualitatifs dans le but de présenter des proportions et la mise en œuvre des tests de Khi-Carré ou Kh2. L’analyse de données avec le logiciel Stata consistait à faire une analyse univariée et bivariée, ainsi que des tests de significativité de différence au seuil de 5% entre différents indicateurs.

 

 

RESULTATS

 

 

Sur les 6373 patients reçus en consultation durant la période d’étude, 514 hypertendus étaient recensés parmi lesquels 102 avaient été inclus. La fréquence de l’HTA était de 8,06%. Le sexe féminin était prédominant avec 53,92% soit un sex-ratio H/F de 0,85. L’âge moyen était de 61,42 ± 10,70 ans avec des extrêmes de 40 et 87 ans. La tranche d’âge la plus concernée était celle de [60 - 80 ans] (Figure 1). La moitié des sujets avait une HTA diagnostiquée il y a moins de cinq ans et 29% avaient une durée d’évolution comprise entre [5-10 ans] (Figure 2).

Les signes de Dieulafoy étaient rapportés dans 26,8%. A l’examen physique, 16% des patients présentaient un syndrome de défaillance cardiaque. La moyenne de la pression artérielle systolique était de 159,60 ± 26,09 mm Hg, avec des extrêmes de 110 et 220 mm Hg. La moyenne de la pression artérielle diastolique était de 93,20 ± 16,97 mm Hg avec des extrêmes de 50 et 150 mm Hg.

Le suivi des patients était régulier dans 44,11% des cas. Le régime hyposodé était respecté chez 68 patients, soit 66,66% des cas. La prise quotidienne du traitement antihypertenseur était régulière chez 74 patients soit 72,55%. Pour ce qui est des protocoles thérapeutiques, la monothérapie était la plus prescrite à 49,03% avec deux classes dominantes : les IEC (38%) et les inhibiteurs calciques (32%). La bithérapie était prescrite dans 46,07% des cas et les associations les plus utilisées étaient : diurétiques-IEC et IEC-inhibiteurs calciques. La trithérapie était administrée dans 4,9%.

L’HTA était contrôlée chez 16 patients soit 15,68% et non contrôlée chez 86 patients soit 84,32%. Parmi les patients non contrôlés l’HTA de grade 3 était la plus observée avec 36 patients soit 35,29% (Tableau 1).

Concernant les facteurs de risque cardiovasculaire associés, une histoire familiale avait été retrouvée dans 69,6% des cas, un diabète dans 19,6%, une dyslipidémie dans 14,7% de cas. Le tabagisme était noté dans 36,30% des cas et était plus fréquent chez les hommes (57%, contre 18% chez les femmes) avec une différence statistiquement significative (P=0,001). Plus des ¾ des patients (76,47%) étaient sédentaires. 26,5% étaient en surpoids et 15,7% avaient une obésité. La moyenne de l’IMC était de 25,01 Kg/m2 ± 5,132 Kg/m2 (extrêmes, 15 Kg/m2 et 40 Kg/m2). Il y avait une nette prédominance féminine de l’obésité (24%, contre 6% chez les hommes) sans différence statistiquement significative (P=0,2). La consommation excessive d’alcool était observée chez 4 patients soit 3,9%. Le nombre de patients ayant affirmé être stressé était au nombre de 50 soit 49,01%. Une prise de contraceptifs hormonaux était notée chez 11.30% des femmes (Tableau 2 et 3).

Le risque cardiovasculaire global était élevé chez 63 patients (61,79%), modéré chez 36 patients (35,27%) et faible chez 3 patients (2,94%) (Tableau 4).

Les complications cardio-vasculaires observées étaient  la cardiopathie hypertensive (35,29%), les atteintes coronariennes (21,56%), les atteintes rénales (18,62%), les AVC (12.74%) et les AOMI (1,96%).

 

 

DISCUSSION

 

 

Les limites de cette étude : Il s’agit d’une étude monocentrique et transversale réalisée sur une courte durée.

Notre étude a montré que l’hypertension artérielle est bien présente en zone sud et elle représentait 8,06% des motifs de consultation au centre de santé de Bignona. Ce taux est inférieur à ceux retrouvés dans d’autres localités. Au Sénégal des travaux réalisés dans les communes de Guéoul et de Darou Mousty avaient retrouvé respectivement des taux de 49,10% et 22,15% [14, 15]. De façon plus large, l’enquête STEPS- SENEGAL avait révélé une prévalence de 29,8% [16]. Ce taux était également inférieur à celui retrouvé dans un milieu spécialisé au Congo BOURAMOUE avec une prévalence de 45% [17]. Des taux plus élevés ont été aussi retrouvés au Canada (25%), [18], en France (31 % selon l’étude Godet Thobie et al). [19] aux Etats Unis (28,6 %). En Asie il était à 18% [3]. Ces divergences pourraient être liées aux différences méthodologiques, mais aussi ethniques, au mode de vie et à l’accès aux soins. Aussi, du fait du caractère souvent asymptomatique de l’HTA, du dépistage insuffisant, ces données sont vraisemblablement sous estimées. En effet, l’HTA est souvent méconnue comme le signalait en 2007 la Direction Générale de la Santé en France : 48 % des hommes et 30 % des femmes hypertendus ignoraient leur hypertension [19]. Le même constat est fait par l’étude menée à Darou Mousty où le taux de dépistage était de 10,05% [15] et à 54,25% dans la commune de Guéoul [14].

On note une prédominance féminine (53,92%), ce qui consolide les résultats de l’enquête STEPS-SENEGAL [16]. Plusieurs études rapportent une prédominance plutôt masculine. Ainsi les prévalences suivantes ont été enregistrées respectivement pour le sexe masculin et féminin : 51% et 42% en Tanzanie en 2006, 45,2% et 35,4% en Tunisie, 53% et 40% dans trois villes de France entre 2005 et 2007 et 43,6% et 35% en Espagne en 2007 [3]. Cependant l’enquête sur l’HTA à Brazzaville [20] ne rapporte pas de différence statistiquement significative selon le genre. La prédominance féminine constatée dans notre étude pourrait s’expliquer d’une part, par le fait que dans nos régions, les structures sanitaires sont plus fréquentées par les femmes pour divers motifs, permettant un dépistage plus fréquent de l’HTA. D’autre part, par l’association multifactorielle chez les femmes notamment l’obésité, la sédentarité, la prise de contraceptives mais aussi par la perte de l’effet bénéfique des hormones sexuelles sur la régulation de l’HTA pour les femmes ménopausées [21].

La prévalence de l’HTA augmente de façon continue avec l’âge, en raison du vieillissement naturel des parois artérielles. Dans notre série, nous avons effectivement observé une fréquence croissante des cas d’HTA avec l’âge avec un maximum entre 60 et 79 ans représentant 50% de l’échantillon. Une baisse progressive du nombre de cas est notée à partir de 80 ans en rapport avec la faible espérance de vie dans nos pays [14, 15].

Cette HTA est fréquemment associée à d’autres facteurs de risque cardiovasculaire dont le diabète retrouvé dans 19,60% cas. Des taux proches de cette association ont été trouvés en milieu hospitalier comme au Burkina où Yaméogo et al avaient trouvé un taux de 24,6% [22]. Qualifié souvent de couple « maudit », l’association HTA et diabète est de plus en plus fréquente.

Le tabagisme représente 36,3% de notre population. Ce taux est largement supérieur à ce qu’on a observé à Guéoul et à Darou Mousty [14, 15]. De la même manière Touré et al dans leur travail effectué dans un milieu hospitalier au Niger selon la méthode STEPWISE de l’OMS avaient signalé une proportion de tabagisme à 10% [23]. Nous constatons donc une fréquence des hypertendus tabagiques nettement plus élevée dans notre étude qui pourrait être liée à la taille de la population sans pour autant sous-estimer le fait que nous nous trouvons dans une zone où le tabagisme traditionnel occupe une grande partie des adultes jeunes ainsi que les sujets âgés.

Les femmes (24%) étaient plus concernées par l’obésité que les hommes (6%) sans que la différence ne soit statistiquement significative (p=0,2). Cette prévalence élevée et la prédominance féminine de l’obésité pourraient être le fait des conditions génétiques mais aussi de facteurs socioculturels : le mode vie sédentaire et l’embonpoint qui est vu comme un critère esthétique ou signe d’aisance sociale chez les femmes au Sénégal et en Afrique Noire [24]. Des auteurs en Afrique du Sud montrent que les femmes avec un surpoids modéré (IMC = 27) étaient plus désirables par leur communauté et que cette image corporelle était associée à la dignité, au respect, à la confiance, à la beauté et à la richesse [25].

La sédentarité représente le facteur de risque le plus fréquemment retrouvé dans cette étude. En effet 76,5% des patients n’avaient pas une activité physique régulière. Cette récurrence de la sédentarité pourrait être expliquée par le manque de sensibilisation des populations sur les bienfaits de la pratique du sport.

Des antécédents familiaux d’HTA avaient été retrouvés dans 69,6% des cas. Ce taux est nettement supérieur à celui enregistré à Darou Mousty (17,6%) et dans la commune de Guéoul (37,4%) [15, 14]. Les antécédents familiaux sont facilement accessibles à l’interrogatoire. Ils reflètent cependant à la fois une susceptibilité génétique et les habitudes de vie familiale (alimentation par exemple). Dans le cas des maladies cardiovasculaires, la susceptibilité génétique est multifactorielle. Elle implique de nombreux gènes et de nombreuses interactions gène-gène et gène-environnement dans la détermination du risque.

Le risque cardiovasculaire global était faible chez 2,94%, modéré chez 35,27% et élevé chez 67,79% dans notre étude. Ce résultat reflète la réalité africaine où les personnes arrivent tardivement au moment du diagnostic avec des chiffres tensionnels très élevés et une atteinte des organes cibles [26]. Il faut signaler aussi que 21% des patients avaient une HTA depuis plus de 10 ans, ce qui pourrait favoriser  la survenue  des complications cardiovasculaires. L’association avec le diabète (19,6% des cas) aggrave le risque cardiovasculaire. Ce profil de risque cardiovasculaire élevé a été rapporté en milieu hospitalier par différentes études dans lesquelles il apparaît tous les éléments d’élévation de risque même si le risque n’a pas toujours été calculé : élévation importante des chiffres tensionnels, fréquence des complications et association de facteur de risque cardiovasculaire [17]. Le risque cardiovasculaire des patients hypertendus est d’autant plus élevé qu’ils cumulent significativement plus de facteurs de risque que la population générale. Ainsi, la fragilité de ces patients est amplifiée et la probabilité de survenue dans les 10 ans de complications sévère augmente considérablement.

Parmi les complications, les cardiopathies hypertensives (35,29%), et ischémiques (21,56%) étaient les plus fréquentes. L’insuffisance cardiaque était retrouvée chez 16% des patients. Ce taux est proche de celui retrouvé en Côte d’Ivoire par Adoubi et al [27]. Les AVC représentaient 12,74% dont 10,78% d’origine ischémique et 1,96% d’origine hémorragique. Les séries hospitalières désignent constamment l’HTA comme le premier facteur de risque d’AVC que ce soit en Afrique [28, 29] que dans les pays développés [30]. Ces accidents surviennent volontiers chez des patients jeunes et sont compliqués d’une mortalité élevée. Kouakou N’Goran et al à Abidjan ont trouvé l'hypertension artérielle comme premier  facteur  de  risque  cardiovasculaire associé aux AVC avec 86,4% des cas [31]. Les autres complications observées dans notre étude étaient : les atteintes rénales (18,62%), l’artériopathie chronique oblitérant des membres inférieurs (1,96%)

 

 

CONCLUSION

 

 

L’HTA est fréquemment associée à des FDR cardiovasculaire modifiables, ce qui accroit le risque cardio-vasculaire global, avec comme corolaire des complications précoces et graves. D’où l’intérêt d’un dépistage précoce et d’un traitement efficace de tous ces facteurs quand ils sont présents.

 

 

Tableau 1

Répartition des patients selon les valeurs de la pression artérielle

 

 

Niveau TA

Effectifs

Fréquence (%)

Normale

16

15,68

HTA grade 1

25

24,50

HTA grade 2

25

24,50

HTA grade 3

36

35,29

 
 

 

Tableau 2

Récapitulatifs des facteurs de risque cardiovasculaire dans la population d’étude.


Facteurs de risque

Effectifs (n=102)

Pourcentage

Diabète

20

19,60

Dyslipidémie

15

14,70

Contraception (n=55)

12

21,81

Obésité

16

15,70

Obésité abdominale

43

42,16

Sédentarité

78

76,50

Tabagisme

37

36,30

Stress

50

49,01

Alcool

  7

  6,86

Antécédents

71

69,60

 

 

Tableau 3

Nombre de FRD associés à l’HTA

 

 

FDR associés à l’HTA

Effectifs

Fréquence (%)

0 FDR

  2

  1,96

1 à 2 FDR

45

44,12

3 FDR et plus

55

53,92

TOTAL2

102

       100

 

Tableau 4

Risque cardiovasculaire global des patients

Selon la Haute Autorité de Santé.

 

 

 

GRADE DE L’HTA

PA normal

Sous traitement

Grade 1

Grade 2

Grade 3

Absence d’autres FDR

Risque

faible

2,94%

Risque

modéré

0,98%

 

1 ou 2

FDR

Risque

modéré

11,76%

Risque

modéré

13,72%

Risque

modéré

8,81%

Risque

élevé

18,66%

≥ 3 FDR

Diabète

AOC

Risque

élevé

14,7%

Risque

élevé

16,66%

Risque

élevé

11,77%

 

 

 

 

Figure 1 : Répartition de la population en fonction des tranches d’âge.

 

 

 

                                   Figure 2 : Répartition de la population d’étude en fonction de la durée d’évolution de l’HTA.

 

 

REFERENCES

 

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