Get Adobe Flash player
4032233
Today
Total :
544
4032233

Thrombus intracavitaire : aspects épidémiologique, clinique, échographique et évolutif au service de cardiologie de l’Hôpital National Ignace Deen de Conakry.

Intracavitary thrombus: epidemiological, clinical and echocardiographic features in the cardiology department of the National Hospital Ignace Deen of Conakry.

 

BALDE E Y1,, BALDEM.D1,2, BEAVOGUI M1, BARRY I S1,  KIMSO O2, TOURE S1,  SOW T1,  CONDE M1.

 Telecharger

RESUME

Introduction : Le thrombus intracavitaire complique un grand nombre de maladies cardiaques. Il est mis en évidence à l’échographie cardiaque.

Matériel et Méthodes : Il s’agit d'une étude prospective longitudinale  de type descriptif sur 12 mois dans le but  de décrire les caractéristiques épidémiologiques et échographiques des thrombi intracavitaires au service de cardiologie de l’Hôpital National Ignace Deen.

Résultats : Au cours de notre étude, 24 cas de thrombus ont été retrouvés à l’échographie transthoracique .  L’âge moyen  était de 42,3±17 ans. Nous avons trouvé une prédominance féminine avec un sexe-ratio de 0,7. Les myocardiopathies dilatées et les cardiopathies ischémiques étaient les facteurs emboligènes les plus rencontrés dans la formation des thrombi intracardiaques avec une fréquence de 25%.

Les thrombi  étaient majoritairement uniques, adhérant à la paroi du ventricule gauche hypokinétique et dilaté.

Tous les patients ont été traités par les anticoagulants (héparines et antivitamines K)

L’évolution était émaillée de complications thromboemboliques dans un quart des cas et un taux de décès de 41,67%. Les patients ayant des cardiopathies ischémiques avaient présenté moins de complication. Le thrombus avait disparu chez 64,7% des patients. La prise des AVK a non seulement été corrélée à un faible taux de complication, mais aussi à la disparition du thrombus. Nous avons également trouvé que la persistance du thrombus était liée à l’hypocinésie des parois.

Conclusion : Le thrombus intracavitaire est responsable de complications thromboemboliques qui mettent en jeu le pronostic vital. En présence des facteurs emboligènes, l’échographie devrait être réalisée systématiquement pour mettre en route l’anticoagulation par AVK.

 

MOTS CLES

Thrombus intracavitaire, échographie transthoracique, complications thromboemboliques.

SUMMARY

Introduction: The intracavitary thrombus complicates many heart diseases. It is diagnosed using echocardiography.

Material and Methods: This was a longitudinal prospective and descriptive study of over 12 months with aim to describe the epidemiological and echocardiographic features of intracavitary thrombi in the cardiology department of the National Hospital of Ignace Deen.

Results: During our study, 24 cases of thrombi were found in transthoracic echocardiography. The mean age was 42.3 ± 17 years. We found a female predominance with a sex ratio of 0.7. Dilated cardiomyopathy and ischemic heart disease were the most emboligenic factors encountered in the formation of intracardiac thrombi with a frequency of 25%. 

The thrombi were mostly single, adhering to the dilated, hypokinetic left ventricular wall.

All patients were treated with anticoagulants (heparins and vitamin K antagonists)

Thromboembolic complications occured in a quarter of cases with a death rate of 41.67%. Patients with ischemic heart disease presented less complication. The thrombus disappeared in 64.7% of patients. Taking AVK was not only correlated with a low rate of complications, but also with the disappearance of the thrombus. We also found that the persistence of the thrombus was associated with hypokinesia.

Conclusion:  Cavitary thrombus is responsible for life-threatening thromboembolic. In the presence of emboligenic factors, echocardiography should be performed routinely to initiate anticoagulation with VKA.

KEY WORDS

Intraluminal thrombus, transthoracic echocardiography, thromboembolic complications.

1. Service de Cardiologie, Hôpital universitaire Ignace

       Deen, Conakry, Guinée

2.  Maître de conférences agrégé

Adresse pour correspondance

Elhadj Yaya BALDE

PB. : 1384 , Kaloum, Conakry.

 Mail : This email address is being protected from spambots. You need JavaScript enabled to view it.

 

INTRODUCTION

L’usage de plus en plus croissant de l’échocardiographie dans les bilans  d’extension de certaines pathologies cardiaques a mis en évidence un nombre non négligeable de thrombi intracavitaires. Ils sont retrouvés lors de l’exploration des embolies pulmonaires ou des AVC ; ces complications étant les principales circonstances de découverte de ces thrombi.

 Nous avons réalisé une étude qui  avait pour but de déterminer la fréquence des thrombi intracavitaires et de décrire leurs caractéristiques au service de cardiologie de l’Hôpital National Ignace Deen de Conakry.

METHODE

Nous avons réalisé une étude prospective longitudinale  de type descriptif sur 12 mois allant du 15 janvier 2013 au 14 janvier 2014 au service de cardiologie de l’Hôpital National Ignace Deen de Conakry. Nous avons ciblé les  patients hospitalisés et  ayant réalisé une échographie cardiaque pendant la période de notre étude. Ont été inclus, les patients dont l’échographie cardiaque détectait la présence d’un thrombus intracavitaire, et qui ont accepté de participer à l’étude.

RESULTATS

Au cours de notre étude, 24 cas de thrombus ont été retrouvés à l’échographie transthoracique. L’ âge moyen de nos patients était de 42,3±17 ans avec des extrêmes de 17 à 71 ans. Nous avons trouvé une prédominance féminine avec un sexe-ratio de 0,7. Les myocardiopathies dilatées et les cardiopathies ischémiques étaient les facteurs emboligènes les plus rencontrés dans la formation des thrombi intracardiaques avec une fréquence de 25%.

Les thrombi  étaient majoritairement uniques (91,7%), adhérant à la paroi (73,7%) du ventricule gauche (87,5%) hypokinétique (54,2%) et dilaté (54,2%). La fraction d’éjection était altérée dans 58,3% des cas.

Les 64,7% des thrombi avaient disparu à l’échographie de contrôle après trois mois de traitement. Nous avons trouvé une diminution dans la taille des cavités dans 70,6% des cas. Cependant la persistance du thrombus était corrélée à  l’hypocinésie des parois (P=0.042). La fraction d’éjection s’était améliorée chez 4 patients soit 23,5 %.

Les  molécules les plus utilisées dans la prévention des accidents thromboemboliques étaient les AVK dans 66,7% des cas. Cependant seuls 50% des patients avaient atteint la zone thérapeutique (INR entre 2-3).

L’évolution était émaillée de complications thromboemboliques dans un quart des cas et un taux de décès de 41,67% a été enregistré. Les patients ayant des cardiopathies ischémiques avaient présenté moins de complication. La prise des AVK a non seulement été corrélée à un faible taux de complication (p=0,006), mais aussi à la disparition du thrombus.

DISCUSSION

Seule l’échocardiographie transthoracique (avec une sonde de 5 MHz) a été utilisée pour le diagnostic des TIC au cours de notre étude. L’ETO n’était pas disponible dans nos structures sanitaires

La fréquence  de 8,39% retrouvée dans notre étude  est supérieure à celle  trouvé par Ralamboson et al. (1) qui avaient trouvé une fréquence de 0,48%. Cette différence pourrait s’expliquer d’une part par la taille de notre échantillon et d’autre part par le fait que dans leur étude l’échocardiographie transthoracique a été réalisée chez tous les patients hospitalisés non seulement au service de maladies cardiovasculaires mais aussi  au service de médecine interne. Or dans notre étude, l’échocardiographie n’a été réalisée que chez les patients ayants des facteurs prédisposants corroborant ainsi la forte probabilité de trouver des thrombi dans une population de cardiopathes qu’ailleurs.

Nous avons trouvé une prédominance féminine avec 10 hommes pour 14 femmes  soit un sexe-ratio de 0,71.

Une étude réalisée par  Sharma et al. au Michigan (USA) (2) avait   trouvé une prédominance masculine 3 hommes pour une femme. Cette prédominance féminine dans notre étude serait due au fait que nous avons analysé de manière exhaustive toutes les pathologies y compris les myocardiopathies idiopathiques du post partum, les valvulopathies en particulier le RM ou la prédominance  est fréquente pouvant favoriser la survenue d’un thrombus contrairement à celle de  Sharma et al. qui  n’a inclu que les infarctus du myocarde  et les cardiomyopathies dilatées.

L’âge moyen de nos patients était de 42,3 ± 17 ans avec des extrêmes de 17 et 71 ans. La tranche d’âge la plus représentative  était celle de 17 à 35 ans. Nos résultats sont superposables à ceux de Kane et al. (3) au Sénégal qui ont trouvé dans leur étude sur la myocardiopathie idiopathique du peripartum une moyenne d’âge de 26 ans avec des extrêmes de 17 et 44.

Cependant nos résultats sont inférieurs à ceux de Ralamboson et al. (1) qui ont trouvé respectivement une moyenne d’âge de 50,3 et 51,3 ans. Ceci s’expliquerait par le jeune âge de la population guinéenne(4).

Les cardiopathies ischémiques et les cardiomyopathies dilatées étaient les facteurs emboligènes les plus retrouvés dans la formation des Trombi intra cardiaques.

Ces valeurs sont analogues à ceux de Bilingsley et Leong-Poi. (5) d’avant la technique de revascularisation. Ceux-ci estimaient qu’avec la technique  de revascularisation précoce par thrombolyse et surtout par l’angioplastie avec stent, le taux de thrombi suite à un IDM est passé de 30-40% à 15% de nos jours. Ils citent également que les thrombi se formaient dans 10-30% des myocardiopathies dilatées. Ralamboson et al. (1) ont rapporté l’apparition des thrombi dans 30%.

Seule l’échocardiographie transthoracique (avec une sonde de 5 MHz) a été utilisée pour le diagnostic des TIC au cours de notre étude. L’ETO n’était pas disponible dans nos structures sanitaires

Dans notre série le thrombus était localisé dans 87,5% des cas dans le VG, de même Ralamboson et al. (1) trouvaient les thrombi dans le ventricule gauche dans 8/10 cas étudiés (1 patient avait un thrombus simultanément dans les 2 cavités ventriculaires).

Le faible taux des thrombi intra auriculaires gauches (8,3%)  dans notre série contre 15 -20% (trouvés par Turhan et al. (6) à Ankara) pourrait s’expliquer par la non disponibilité de l’ETO. Cette dernière a une sensibilité et une spécificité respectivement de 93-100% et 99-100% contre une sensibilité de seulement 40-60% de l’ETT pour la détection des thrombi intra auriculaires gauches (6).

Les 73,7% des thrombi adhéraient à la paroi. Par ailleurs, 54% étaient adjacents à un segment hypokinétique.

Ces caractéristiques étaient semblables à celles  décrites dans la littérature notamment une localisation à prédominance apicale, adhérant à la paroi sur un segment hypokinétique (3,5,6).

Six patients (25,00 %) avaient présenté une complication thromboembolique. Nos données étaient comparables aux valeurs de la littérature (7–9).

Par contre Sharma et al. (2) avaient obtenu une fréquence de 17%. Cette différence serait due non seulement au non usage systématique d’anticoagulation chez tous nos patients mais également à la discontinuité dans la prise.

L’absence de complication dans l’étude de Kane A et al. (3) tenait à la mise systématique sous traitement anticoagulant de ses patients.

Nous avons enregistré 10 (41,7%) décès ; comparables à ceux de Ralamboson et al. (1) (50% de décès),  mais supérieurs à ceux de Sharma ND et al. (2) aux USA (14% de décès). Cela pourrait s’expliquer par le fait que les structures sanitaires aux États Unis soient mieux équipées pour la gestion des complications thromboemboliques que celles se trouvant dans les pays en voie de développement.

Les thrombi avaient disparu dans 64,7% des échographies de contrôle. Ralamboson et al. (1) ont trouvé des valeurs semblables aux nôtres. Cependant Kane et al. (3) ont observé 100% de disparition de thrombus.

Ce résultat tiendrait à la mauvaise observance de certains de nos patients

Les patients ayant une cardiomyopathie dilatée ont présenté plus de complications  dans notre série. Et ceux ayant des cardiopathies ischémiques ont présenté moins de complications que les autres patients.

 Durant notre période d’étude, 5 des 6 patients soit (66%) présentant une cardiomyopathie dilatée,  ont eu un accident thromboembolique. Sharma et al. (2) citent que les évènements thromboemboliques compliquaient jusqu'à 50% des cardiomyopathies dilatées. Ils ont démontré qu’une fraction d’éjection basse, la dilatation du diamètre ventriculaire gauche en diastole étaient des facteurs prédisposant aux embolies périphériques.

Ralamboson et al.(1) avaient trouvé une prédominance d’accidents thromboemboliques chez les patients ayant une cardiomyopathie dilatée,   et cardiopathies ischémiques. Nous avons trouvé cette prédominance pour les cardiomyopathies dilatées cependant dans notre étude les patients avec une cardiopathie ischémique ont présenté moins de complications thromboemboliques.

Ceci s’expliquerait par le fait que la prise en charge des cardiopathies ischémiques en particulier les infarctus du myocarde est bien codifiée dans le service et la mise en route du traitement anticoagulant se fait immédiatement après le diagnostic.

 Les groupes de médicaments les plus utilisés pour la prévention des accidents thromboemboliques étaient les Antivitamines K et les antiagrégants plaquettaires dans 66,7 et 54,2% des cas. 

Cette forte utilisation des AVK s’expliquerait par les études autoptiques qui ont montré que les AVK, à un stade précoce, réduisaient les thromboses intra cavitaires et les embolies systémiques. A forte dose (INR  compris entre 2,6 et 4.8) les AVK réduiraient les complications thromboemboliques de 56% ; cependant les AVK à forte dose s’accompagneraient d’une augmentation de l’incidence des accidents hémorragiques (10).

Nos valeurs étaient inférieures d’une part à celles de Kane A et al. (3) au Sénégal, Sharma ND (2) aux USA  qui avaient  soumis tous leurs patients aux AVK uniquement et d’autre part à celles de Ralamboson SA (1) qui avait soumis ses patients à l’association AVK/HBPM.

Seuls 4 patients  avaient  effectué plus de 3 TP/INR. Ce faible taux de réalisation serait dû au faible niveau socio-économique de notre population et du coût relativement élevé de ces examens.

Sur nos 24 patients, 16 ont reçu les AVK (66,7%) parmi lesquels 10 n’ont pas présenté de complications (62,5%).

Par ailleurs, il existait une liaison statistiquement significative (p<0,05) entre l’évolution clinique et la prise d’AVK.

Sous l’association AVK/Antiagrégant plaquettaire, 100 % des patients ont vu leur thrombus disparaître de même que 66,6% de ceux ayant reçu HBPM/AVK. Ralamboson et al.(1) ont trouvé des valeurs similaires avec l’association HBPM/AVK.

CONCLUSION

 Le thrombus intracavitaire est responsable de complications thromboemboliques qui mettent en jeu le pronostic vital. En présence des facteurs emboligènes, l’échographie devrait être réalisée systématiquement pour mettre en route l’anticoagulation par AVK.  

 

R      E      F      E      R      E      N      C      E      S

 

1. Ralamboson S. Aspects épidémio-cliniques et échographiques des thrombi intracavitaires cardiaques vus au centre Hospitalier de Soavianandriana. Rev Médicale Madag. 2011;1(3):58–62.

2. Sharma N, McCullough P. Left Ventricular Thrombus and Subsequent Thromboembolism in Patients with Severe Systolic Dysfunction. 2000;117:314–20.

3. Kane A, Mbaye M, Ndiaye M. Evolution et complications thromboemboliques de la myocardiopathie idiopathique du peripartum au CHU de Dakar: étude prospective a propos de 33 cas. J Gynécologie Obstétrique Biol Reprod. 2010;39:484–9.

4. Ministère du Plan Guinée. Enquête démographique et de santé et à indicateurs multiples. Conakry, Guinée: Institut National de la Statistique; 2012 p. 530.

5. Bilingsley IM, Leong-Poi S. Left ventricular thrombus; Diagnosis, Prevention, and Managment. Cardiol Rounds. 2005;X(7):314–20. 

 

6. Turhan S, Ozcan O, Erol C. Imaging of intracardiac thrombus. Cor Vasa. 2013;55:179–83.

7. Gibelin P. Traitement anticoagulant et Cardiomyopathie dilatée. Arch Mal Coeur Vaiss. 1995;88:617–21.

8. Philippe F, Drobinski G. Diagnostic Échographique des Thrombi Intracavitaires Gauches: Apport des sondes de hautes fréquences. J Radiol. 2000;81:435–9.

9. Kontny F, Dale J, Abildgaard U. Randomized Trial of Low Molecular Weight Heparin (Dalteparin) in Prevention of Left Ventricular Thrombus Formation and Arterial Embolism After Acute Anterior Myocardial Infarction: The Fragmin in Acute Myocardial Infarction (FRAMI) Study. J Am Coll Cardiol. 1997;30(4):962–9.

10. Philippe F. Thrombose intracavitaire gauche et risque thromboembolique. Sang Thromb Vaiss. 1998;10:216–22