Cas Clinique. Case Report Le phéochromocytome de l’enfant, à propos d’un cas révélé par une hypertension artérielle sévère.
Pheochromocytoma in children. A case report revealed by a severe hypertension.
H.BAKO¹, M.N.D..SIDDO¹, A.SEIBOU ², H.HAROUNA¹, I.TAHIROU¹, M. ZAKI³, A.GADO¹, O.HANKORAOU¹, A.I. TOURE4.
RESUME
Nous rapportons un cas de phéochromocytome chez un enfant âgé de 8 ans, suivi depuis un an, en ambulatoire pour hypertension artérielle sévère. Le diagnostic a été orienté par les signes cliniques. Le scanner abdominal avait mis en évidence une masse surrénalienne gauche. Le diagnostic phéochromocytome est posé par le dosage des VMA urinaires et confirmé par l’examen anatomopathologique de la pièce opératoire. L’évolution a été favorable après exérèse de la tumeur avec normalisation des chiffres tensionnels.
MOTS CLES
Phéochromocytome, hypertension artérielle, enfant.
RESUME
We report a case of a pheochromocytoma 8 years child, followed since one year in outpatient for severe hypertension. The diagnosis was guided by clinical data. The abdominal CT scan had revealed a left pararenal mass. Pheochromocytoma diagnosis is made by measurement of urinary VMA and confirmed by histological examination of the surgical specimen. The outcome was favorable after resection of the tumor with normalization of blood pressure.
KEY WORDS
Pheochromocytoma, hypertension, child.
1-Pôle de cardiologie de l’Hôpital National de Niamey 2-Service de chirurgie générale de l’Hôpital National de Niamey 3-Service d’anatomo-pathologie de l’Hôpital Lamordé de Niamey 4-Service de cardiologie de l’Hôpital Lamordé de Niamey |
Adresse pour correspondance : DODDO SIDDO M. N., Cardiologue au pôle de cardiologie Hôpital National de Niamey BP : 238 Niamey, Niger. Email : This email address is being protected from spambots. You need JavaScript enabled to view it. |
INTRODUCTION
Le phéochromocytome est une tumeur qui se développe aux dépens des cellules chromaffines, le plus souvent médulosurrénaliennes, produisant un excès de catécholamines [1,2] dont la principale manifestation clinique est l’hypertension artérielle. L’incidence annuelle de ces tumeurs rares est de 1 à 4 par million d’habitants [3]. Parmi toutes les causes d’hypertension artérielle, le phéochromocytome est fréquemment évoqué ou recherché mais exceptionnellement diagnostiqué [3,4].Chez l’enfant, l’incidence du phéochromocytome est de 0,0002 %, ce qui correspond approximativement à 20 % des cas [3]. Il atteint surtout les garçons dont l’âge moyen au moment de la découverte est de 10 ans [1,5-8].
Nous vous rapportons un cas de phéochromocytome révélé principalement par une HTA permanente et sévère chez un garçon de 8 ans.
OBSERVATION
L’enfant BA, âgé de 8 ans, sans antécédent pathologique connu, est suivi depuis un an en ambulatoire pour une HTA sévère. L’interrogatoire de sa mère rapportait la notion de sueur nocturne mouillant les draps malgré la climatisation, la survenue de céphalées violentes surtout frontales génératrices d'insomnie et de plaintes incessantes.
L’examen clinique, à l’admission dans le service de cardiologie notait une pression artérielle à 180/85 mm Hg, une température à 36°5 C, une fréquence cardiaque à 112 battements par minute et un indice de mase corporel à 19,5 kg/m2 (taille à 1,05 m et poids à 20 kg). L’examen physique était sans particularité en dehors d’une sensibilité de l’hypochondre gauche. Le bilan biologique comportant l’hémogramme, la glycémie, l’urée, la créatininémie, la recherche de protéinurie était normal.
Le fond d'œil a mis en évidence une rétinopathie hypertensive stade III selon la classification de Kirkendall (œdème papillaire, nombreux exsudats cotonneux).
Le scanner abdominal (figure 1) a montré une masse ovalaire bien limitée de 48 mm sur 36 mm enjambant le bras latéral de la surrénale gauche.
Devant ce tableau clinique et para clinique le diagnostic du phéochromocytome a été suspecté indiquant le dosage de l’acide vanyl mandélique (VMA) urinaires qui est revenu élevée à 27,18 µmol/l pour une normale inférieure à 10 µmol/l. Le diagnostic de phéochromocytome est retenu et l’enfant était alors mis sous antihypertenseurs à base de d’alpha-bloquant associé à un bétabloquant. L’enquête familiale ne rapporte pas de cas familial.
L’évolution sous traitement médical en attendant l’exérèse de la tumeur est favorable avec diminution significative des chiffres tensionnels. L’enfant a été opéré par laparotomie avec exérèse complète de la tumeur (figure 2). L’examen anatomopathologique de la pièce opératoire (figure 3) a confirmé le diagnostic de phéochromocytome en montrant une formation ovoïde faite de cellules à cytoplasme basophile et un noyau doté d’une chromatine fine et d’un nucléole à limite cytoplasmique nette disposés en travées et en cordons.
Les suites post-opératoires ont été simples. L'évolution a été favorable avec disparition des symptômes et normalisation de la pression artérielle après l’arrêt des antihypertenseurs.
Le patient est asymptomatique après un recul de 6 mois avec des chiffres tensionnels normaux.
DISCUSSION
La symptomatologie du phéochromocytome est polymorphe et causée principalement par la production excessive de catécholamines [1,5-7,9-11]. Plusieurs manifestations cliniques ont été décrites, mais aucune d’entre elles n’est spécifique [1, 5, 6, 8, 9, 11]. L’hypertension artérielle est presque toujours présente, mais le phéochromocytome est une étiologie très rare des hypertensions artérielles de l’enfant représentant 1 à 2% [1, 5, 6, 7, 10, 11, 12]. Chez l’enfant, la symptomatologie est plus souvent atypique [1, 5, 7]. Ces manifestations surviennent en présence d’une tumeur sécrétant principalement de l’épinéphrine et de la dopamine et peuvent consister en un arrêt de la croissance accompagné d’amaigrissement, une asthénie avec une altération de l’état général, des troubles de la glycorégulation, des troubles neurologiques avec anxiété et des troubles visuels [1,5-7,9-11].
Le diagnostic de phéochromocytome par le biais de l’exploration d’une cause à l’hypertension artérielle sous-estime la fréquence de ces tumeurs puisque 70% d’entre elles seulement sont compliquées d’HTA [9].
Orienté par les signes cliniques d’appel, le diagnostic repose sur la mise en évidence d’une production excessive de catécholamines [1, 5, 6-8,10-12, 14]. L’examen clinique notamment la triade symptomatique céphalées, sueurs, palpitations associé au dosage des métanéphrines plasmatiques et/ou urinaires permettent de poser le diagnostic. Les VMA, qui ont été dosés chez notre patient, en l’absence de disponibilité des métanéphrines et normétanéphrines urinaires, sont moins spécifiques.
Le diagnostic de localisation d’un phéochromocytome repose sur le TDM avec injection d’iode ou l’IRM thoraco-abdominopelvienne et du cou.
Dans notre cas, nous avons été orienté par les signes cliniques d’appel notamment une hypertension artérielle s’accompagnant de transpirations excessives nocturne, tachycardie, de céphalées, Le scanner abdominal devant les signes cliniques évocateurs, a permis de mettre en évidence la masse tumorale. Comme il est rapporté dans la littérature [1,5-7,11], l’exérèse de la tumeur a permis de guérir notre patient avec arrêt du traitement antihypertenseur.
CONCLUSION
La découverte d’une hypertension artérielle chez l’enfant doit conduire systématiquement à la recherche d’un phéochromocytome. Le caractère souvent familial des phéochromocytomes de l’enfant doit inciter à explorer les autres membres de la famille
Sa prise en charge est médico-chirurgicale et multidisciplinaire impliquant le cardiologue, l’endocrinologue, le chirurgien viscéral, l’anesthésiste et l’anatomopathologiste.
La cure radicale relève d'une chirurgie délicate habituellement précédée d'une préparation médicale reposant surtout sur un traitement symptomatique inhibant les effets des catécholamines.