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Les effets immédiats du Carvedilol dans l’insuffisance cardiaque au CHU de Mahajanga à Madagascar : Etude prospective.

 

Immediate effects of Carvedilol in patients with heart failure at the Teaching Hospital of Mahajanga (Madagascar): A prospective study.

 

NA RANDRIAMIHANGY1, JSC MAMONJISOA1, D HARIBENJA RASOAVOLOLONA1, LB RAHANTANIRINA1,

ADP RAKOTOMALALA1, N RABEARIVONY2, S RAKOTOARIMANANA 3

 

 

RESUME

 

Introduction : Dans l’insuffisance cardiaque chronique, les études publiées sur les bêta-bloquants ont décrit les effets de ces molécules après plusieurs semaines ou mois de traitement. Notre objectif était de décrire les effets immédiats, cliniques et à l’électrocardiogramme, du carvédilol chez les insuffisants cardiaques de notre service.

Méthodes : C’est une étude prospective descriptive de 12 mois (octobre 2014 à septembre 2015), réalisée au service de Cardiologie du CHU Mahavoky Atsimo. Nous avons administré le carvédilol à la dose de 6,25 mg, puis surveillé les patients cliniquement durant les 3 premières heures. Un électrocardiogramme était enregistré avant et 2 heures après la prise de carvédilol.

Résultats : Nous avons retenu 66 patients, âgés de 54 ans en moyenne (17 à 92 ans), et dont 51,5% étaient des femmes. Soixante-neuf pourcent des patients étaient au stade II et 31% au stade I de la classification de New York Heart Association (NYHA). Pour la fonction systolique, 28,8% des patients avaient une FEVG (fraction d’éjection ventriculaire gauche) diminuée (< 40%), 40,9% une FEVG préservée (40-60%), 25,7% une FEVG normale (> 60%), et 4,5% une FEVG imprécise. Trois heures après l’administration de carvédilol, nous avons observé une diminution de la fréquence cardiaque de 9,53 ± 8,26 bpm (p = 0,000), de la pression artérielle systolique de 11,30 ± 13,30 mmHg (p = 0,000), et de la pression artérielle diastolique de 4,47 ± 10,08 mmHg (p = 0,001). Au total, 59,1% des patients n’ont présenté aucun effet indésirable, 37,9% ont présenté des effets indésirables mineurs et 3,0% n’ont pas toléré le traitement. Une somnolence était observée chez 24,2% des patients, et un nouveau bloc auriculo-ventriculaire du premier degré dans 3,0%. Les facteurs suivants étaient significativement associés à une diminution de la fréquence cardiaque : absence de diabète (p = 0,012), stade I de NYHA de la dyspnée (p = 0,029) et FC > 85 bpm (p = 0,02).

Conclusion : Dans notre travail, la tolérance du carvédilol était acceptable. Cependant les effets bradycardisant et hypotenseur en quelques heures sont plus marqués que ceux décrits dans la littérature après plusieurs semaines de traitement. Aussi, une surveillance au cours de l’initiation du traitement reste justifiée.

 

 

MOTS CLES

 

Insuffisance cardiaque, bêtabloquant, carvédilol, effets, tolérance.

 

 

SUMMARY

 

Background: In chronic heart failure, published studies on betablockers described the effects of these molecules after several weeks or months of treatment. The aim of this study was to describe immediate effects of carvedilol in patients with heart failure.

Methods: We conducted a prospective and descriptive study during a 12 months-period (October 2014 to September 2015) at the Cardiology department of the University Hospital of Mahavoky Atsimo in Mahajanga. Carvedilol was administered at a dose of 6.25 mg. Symptoms were monitored during 3 hours after carvedilol administration. An ECG was recorded before and 2 hours after carvedilol administration. Results: We enrolled 66 patients (51.5% were women). Mean age was 54 years old (17 to 92). Sixty-nine percent of our patients were rated NYHA II and 31% NYHA I. Regarding systolic function, left ventricle ejection fraction (LVEF) was decreased (< 40%) in 28.8%, preserved (40-60%) in 40.9%, normal (> 60%) in 25.7% and imprecise in 4.5%. Heart rate average decrease was 9.53 ± 8.26 bpm (p = 0,000). Systolic blood pressure average decrease was 11.30 ± 13.30 mmHg (p = 0,000), while it was 4.47 ± 10.08 mmHg (p = 0,001) for diastolic blood pressure. Good tolerability without adverse effect to cravedilol was seen in 59.1% of patients, minor adverse effects in 37.9%, and intolerance in 3%. Intolerance led to significant and symptomatic reduction of systolic blood pressure and cardiogenic shock. Regarding the adverse effects, drowsiness was seen in 24.2% of patients, and a new first-degree atrioventricular block in 3.0%. The following factors were significantly associated to the heart rate decrease: diabetes-free status (p = 0,012), NYHA I class dyspnea (p = 0,029), and heart rate > 85 bpm (p = 0.02).

Conclusion: In our series, tolerability to carvedilol was acceptable. Nevertheless heart rate decrease and hypotension were more obvious than those described in the literature after several weeks of treatment. Thus, medical supervision during treatment initiation remains useful and justified.

 

 

KEY WORDS

Heart failure, betablocker, carvedilol, effects, tolerability.

 

 

Adresse pour correspondance 

Dr Narindrarimanana Avisoa RANDRIAMIHANGY

Service de Cardiologie du CHU MahavokyAtsimo,

401 Mahajanga, Université de Mahajanga, Madagascar

Tél : +261341102142

 

Email : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

 

 

INTRODUCTION

 

Les bêtabloquants font partie du principal traitement des insuffisances cardiaques chroniques avec fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) réduite [1]. En fonction de l’étiologie de la cardiopathie et/ou de ses complications (cardiopathies ischémiques, arythmies etc.), les   insuffisants cardiaques avec une FEVG non réduite peuvent également recevoir un bêtabloquant. L’introduction du bêtabloquant doit être progressive jusqu’à la dose cible ou à la dose maximale tolérée. En effet, les bêtabloquants sont bien connus pour leurs effets inotrope, chronotrope, bathmotrope et dromotrope négatifs. Leur efficacité est spectaculaire dans l’amélioration de la morbimortalité des insuffisants cardiaques au long cours [1]. Dans la littérature, les effets des bêtabloquants et la tolérance des patients à ces molécules ont été décrits plusieurs semaines ou mois après leur initiation [2-9]. Par contre, la description des effets immédiats, c’est-à-dire au cours des premières heures, après la première prise de ces molécules reste insuffisante.

Dans la présente étude, notre objectif était de décrire les effets cliniques et électriques du carvédilol au cours des trois premières heures de son administration aux patients insuffisants cardiaques.

 

 

MATERIELS ET METHODES

 

Nous avons réalisé une étude prospective descriptive sur une période de 12 mois (octobre 2014 à septembre 2015) au sein du service de Cardiologie du CHU Mahavoky Atsimo de Mahajanga, une ville située sur la côte Ouest de Madagascar. Le traitement bêtabloquant étant déjà  recommandé et indiqué, l’étude consistait tout simplement à les observer et à collecter les données sur les effets immédiats de ce traitement.  La comparaison avec un placebo n’était donc pas nécessaire. De plus les participants étaient surveillés en hospitalisation et au repos. D’où le choix de ne pas comparer avec un groupe contrôle de patients sains. Notre population d’étude était constituée des patients hospitalisés pour insuffisance cardiaque selon la définition et les critères de diagnostic de la Société Européenne de Cardiologie [10]. Nous avons inclus tous les patients présentant une insuffisance cardiaque stable et pour qui une indication à un traitement bêtabloquant était posée. Ces patients étaient déjà sous inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) ou antagoniste du récepteur de l’angiotensine II (ARAII). Nous avons exclu ceux qui avaient une contre-indication au bêtabloquant, ceux ayant une insuffisance rénale pouvant modifier la pharmacocinétique des  médicaments et ceux qui n’ont pas pu bénéficier d’un bilan paraclinique suffisant, notamment un bilan biologique minimal, un électrocardiogramme (ECG) et une échographie cardiaque. Pour l’échographie cardiaque, nous avons considéré la fonction systolique comme diminuée en cas de FEVG < 40%, préservée en cas de FEVG de 40-60% et normale en cas de FEVG > 60%. La FEVG imprécise ne constituait pas un critère d’exclusion. En effet, cette variable était difficile à évaluer pour certains de nos patients comme en cas d’anévrisme du ventricule, de dyskinésie de la paroi ventriculaire ou de mauvaise échogénicité du patient.

Comme dans certaines études [2,8], nous avons administré une dose initiale de carvédilol de 6,25 mg. Nous avons choisi cette dose principalement pour une raison de commodités. En effet, à cette époque, nous ne disposions pas de présentation à plus faible dosage que le comprimé de 25 mg. Ainsi, il était beaucoup plus difficile d’obtenir une dose inférieure à 6,25 mg qui correspond déjà à un quart de comprimé.

Nous avons surveillé les signes cliniques et les paramètres vitaux de ces patients, au repos, pendant trois heures après la prise du bêtabloquant : toutes les 15 minutes pendant la première heure, puis toutes les 30 minutes pendant les deuxièmes et troisièmes heures.  Un ECG était enregistré avant la prise de carvédilol et à la fin de la deuxième heure. Les variables étudiées étaient : l’âge, le genre, la pression artérielle systolique (PAS), la pression artérielle diastolique (PAD), la fréquence cardiaque (FC), la fréquence respiratoire (FR), les antécédents, les signes cliniques, les modifications de l’ECG, la FEVG initiale ainsi que les autres caractéristiques de l’insuffisance cardiaque.

Selon la tolérance au traitement, nous avons classé les effets immédiats du traitement en trois catégories : 1) absence d’effets indésirables, 2) effets indésirables mineurs en cas de symptômes passagers et ne nécessitant pas de mesures thérapeutiques spécifiques ni l’arrêt du traitement, 3)  intolérance au traitement en cas de signes majeurs justifiant un traitement spécifique et/ou l’arrêt du traitement bêtabloquant.

L’étude a été faite avec un consentement éclairé des patients pour la collecte et l’utilisation des données. Nous leur avons expliqué la nécessité du traitement bêtabloquant selon les recommandations, la possibilité de survenue des effets indésirables, les buts de l’étude et le déroulement de la surveillance. Les données obtenues étaient saisies et analysées sur le logiciel SPSS 20.0. La description des variables quantitatives a été faite sous forme d’effectifs, de pourcentages, de moyennes et d’écarts types. La comparaison des moyennes a été réalisée avec le test de Student pour les séries appariées. La recherche d’association entre les variables qualitatives a été réalisée avec le test de Chi-carré. La valeur de p < 0,05 a été considérée comme significative pour ces tests statistiques.

 

 

RESULTATS

 

Nous avons inclus 102 patients insuffisants cardiaques et retenu 66 selon les critères décrits précédemment. Le sex-ratio était de 0,9 avec 34 (51,5%) femmes. L’âge moyen était de 54 ± 20,0 ans (17 à 92 ans). Les caractéristiques des patients sont présentées dans le tableau I et celles des insuffisances cardiaques dans le tableau II.

Une diminution de la FC a été constatée chez 92,4% (n = 61) de nos patients. Cette diminution a débuté dès le premier quart d’heure après la prise de carvédilol, avec une diminution constante jusqu’à la fin de la 3e heure (figure 1). Au total, la diminution moyenne de la FC était de 9,53 ± 8,26 bpm au bout de 3 heures (p = 0,000) (Tableau III).

Sur 89,4% (n = 59) des patients, nous avons remarqué une diminution de la PAS. La diminution de la PAS était maximale à la 1ère heure, puis une légère augmentation a été constatée (figure 2). Au total, la diminution de la PAS était de 11,30 ± 13,30 mmHg en moyenne à la fin de la 3e heure (p = 0,000) (Tableau 3).

Nous avons constaté une diminution de la PAD chez 66,7% (n = 44) des patients. Cette diminution était nette à partir de la trentième minute et maximale à 1 heure, puis une légère augmentation était constatée (figure 3). Au total, la diminution de la PAD était de 4,47 ± 10,08 mmHg en moyenne (p = 0,001) (Tableau 3).

Sur le plan électrique, 3,0% (n = 2) des patients ont présenté un nouveau bloc auriculo-ventriculaire du 1er degré (BAV I) à la 2e heure. Aucune autre nouvelle anomalie électrique n’a été observée.

Les facteurs suivants étaient significativement associés à une diminution de la fréquence cardiaque : absence de diabète (p = 0,012), stade NYHA I de la dyspnée (p = 0,029) et une FC > 85,5 bpm (p = 0,020) (Tableau 4).

Au total, 59,1% (n = 39) des patients n’ont présenté aucun effet indésirable, 37,9% (n = 25) ont présenté des effets indésirables mineurs et 2 patientes (3,0%) n’ont pas toléré le traitement. Les signes apparus durant la surveillance sont représentés sur la figure 4 avec une prédominance des somnolences (24,2%). Les signes d’intolérance étaient un choc cardiogénique et une diminution importante et symptomatique de la pression artérielle à 68 mmHg pour la systolique (figure 4).

 

DISCUSSION

 

Fréquence cardiaque et pression artérielle

 

La diminution des valeurs de ces variables cliniques objectives était très significative (Tableau 3) avec un écart important par rapport à leur valeur initiale. Néanmoins, les données ne sont pas comparables à celles des autres auteurs qui n’ont publié que des résultats à plusieurs semaines ou mois après le début du traitement bêtabloquant de leurs patients [2-9].  Nous avons observé une diminution moyenne de la FC de 9,53 bpm au bout de 3 heures.  Edelmann et al. rapportent une réduction moyenne de 6,6 bpm en cas de FEVG préservée et de 6,9 bpm en cas de FEVG réduite au bout de 12 semaines de traitement par carvédilol ou bisoprolol jusqu’à la dose cible ou à la dose maximale tolérée [2]. Verdú Rotellar, à Barcelone, rapporte une diminution moyenne de la FC de 12,1 bpm sous bisoprolol ou carvédilol titrés pendant 6 mois [3]. Une étude sur 145 patients traités par carvédilol à 6,25 mg par jour avec une titration toutes les 2 semaines rapporte une diminution moyenne de la FC de 9 bpm au bout de 12 semaines [4]. En Tunisie, une diminution moyenne de 2,2 bpm était observée sur 40 patients ayant une altération de la FEVG, 3 mois après l’obtention de la dose maximale tolérée de bisoprolol [5].

Même si nos résultats à quelques heures ne sont pas comparables à ceux observés à plusieurs semaines ou mois du début de traitement, la diminution globalement moindre de la FC rapportée dans ces autres études était constatée sous une dose de bêtabloquant de loin plus élevée que la nôtre. Notre étude laisse ainsi penser que soit nos patients sont plus sensibles aux bêtabloquants que les autres, soit l’effet du bêtabloquant est plus marqué au cours des premières heures qu’au long cours. Cela pourrait être dû à  une diminution de l’effet du bêtabloquant après la saturation, au long cours, d’un nombre élevé de récepteurs bêta par rapport à ce qui se passerait au début du traitement où un blocage brutal d’un nombre croissant de ces récepteurs entrainerait un effet brutal et rapidement croissant. La littérature rapporte d’ailleurs une régression des effets indésirables du traitement bêtabloquant au long cours [11,12]. Pour la FC, la réponse au carvédilol statistiquement plus significative des patients non diabétiques doit être interprétée prudemment à cause du faible effectif des diabétiques dans notre échantillon. Néanmoins, une diminution de la réponse du système sympathique pourrait être expliquée par la neuropathie diabétique en cas de diabète évolué. En effet, les signes de neuropathie cardiaque sont parmi les manifestations les plus fréquentes de la neuropathie diabétique, avec notamment une tachycardie au repos et une perte de la variabilité respiratoire de la FC [13]. Mais le stade d’évolution du diabète et ses éventuelles complications n’ont pas été précisés dans notre questionnaire. L’effet du carvédilol a été également plus marqué sur les patients ayant initialement une FC > 85,5 bpm contre le reste. Il est bien connu que plus la fréquence cardiaque initiale est élevée, plus les bêtabloquants apportent de bénéfices [14,15]. Une fréquence cardiaque plus accélérée témoigne d’une activation plus importante du système sympathique, l’un des principaux mécanismes adaptatifs au cours de l’insuffisance cardiaque [11]. Ce qui pourrait expliquer le ralentissement plus marquée de la FC provoqué par l’antagoniste du récepteur bêta-adrénergique en cas de FC plus élevée. Enfin, nous comprenons facilement que moins le patient est dyspnéique (stade I de NYHA vs stade II), plus la réduction de sa fréquence cardiaque sera facile à observer, comme nous l’avons constaté.

Le retentissement de cette diminution de la FC est bien visible sur la PAS de nos patients. La diminution moyenne de 11,30 mmHg à la fin de la 3e heure est assez frappante si on la compare aux résultats de l’étude d’Edelmann et al. au cours de laquelle une diminution moyenne de la PAS de 14,3 mmHg en cas de FEVG préservée et de 7,5 mmHg en cas de FEVG réduite était observée au bout de 12 semaines [2], et à ceux de Verdú Rotellar et al. avec une diminution moyenne de la PAS de 11,2 mmHg en 6 mois [3], ou encore à ceux de Maazoun et al. en Tunisie où une diminution d’environ 2 mmHg a été observée 3 mois après l’obtention de la dose maximale tolérée de bisoprolol [5]. Pour la PAD, la diminution moyenne de 4,47 mmHg dans notre étude est aussi plus marquée que celle des autres études : de 0,3 mmHg en 6 mois [3] et de 5,2 mmHg en cas de FEVG préservée et 4,1 mmHg en cas de FEVG réduite en 12 semaines [2] ou encore de 0,27 mmHg en 3 mois [5].

Pour comparer correctement ces populations, il faudrait réaliser des études sur les effets plus tardifs du carvédilol sur notre population et sur ses effets immédiats sur les populations des autres pays.

 

Tolérance au bêtabloquant et évènements indésirables

 

Les deux principaux signes d’intolérance au carvédilol observés étaient un choc cardiogénique et une baisse importante et symptomatique de la pression artérielle. Les autres effets indésirables étaient sans gravité. En Argentine, 93,3% des 316 patients ont bien toléré l’initiation au carvédilol et 47,7% des patients ont atteint la dose cible de 50 mg/jour [7].

L’étude de Butler et al. sur la tolérance au traitement bêtabloquant des insuffisants cardiaques a trouvé que les effets indésirables les plus courants étaient la fatigue (56%), les vertiges (41%) et la dyspnée (29%). La fatigue (30%) et l’hypotension (28%) étaient les principales raisons d’arrêt du traitement mais le traitement bêtabloquant pouvait être toléré après changement de la molécule pour certains patients [8].

A Barcelone, 70,4% des patients souffrants d’insuffisance cardiaque systolique mis sous bisoprolol ou carvédilol ont présenté surtout des vertiges, asthénie et dyspnée. La majorité (57,9%) de ces signes étaient sans gravité et n’ont pas nécessité une diminution de la dose de bêtabloquant. Seuls 3,3% n’ont pas toléré le traitement en raison de bradycardie, de syncope ou d’accident vasculaire cérébral [3].

Notre étude montre un taux d’intolérance au bêtabloquant faible et comparable aux résultats des autres auteurs.

Concernant les troubles de la conduction électrique, l’apparition d’un classique BAV I a été observée chez 3% de nos patients. En Turquie,  l’apparition d’un BAV était observée chez 20  patients sur 186 (10,2%) 6 mois après l’administration de bêtabloquant avec 19 BAV I et 1 BAV III [9]. En Tunisie, un allongement moyen de l’espace PR de 4,7 millisecondes a été rapporté 3 mois après l’obtention de la dose maximale tolérée de bisoprolol [5]. Ces troubles de la conduction sont dus à l’effet dromotrope négatif des bêtabloquants.

 

Limites de l’étude

 

D’abord, il est toujours difficile de décrire de façon très objective les effets indésirables fonctionnels d’un traitement ; d’autant plus que    la    possible    survenue    de    ces   effets indésirables avait été expliquée aux participants pour justifier la surveillance très rapprochée et la nécessité de leur consentement. Ainsi les patients avertis peuvent prêter une trop grande attention et avoir tendance à exagérer les symptômes. Néanmoins cette éventuelle source de biais est présente dans toutes les autres études similaires et ne constitue donc pas un obstacle à la comparaison de ces travaux.

Ensuite, nos patients étaient observés au repos. Ce qui facilite la surveillance et la collecte des variables cliniques. Par contre les résultats pourraient être différents chez des patients autorisés à faire un effort physique comme marcher après la prise du bêtabloquant. En effet, le repos pourrait minimiser les éventuels effets indésirables recherchés.

Enfin, la taille de notre échantillon est assez faible. Ce qui fait de ce travail une étude préliminaire. Il est ainsi souhaitable de reconduire l’étude sur un échantillon plus représentatif et multicentrique.

 

 

CONCLUSION

 

Les effets bradycardisant et hypotenseur du carvédilol sur nos patients au cours des premières heures de traitement sont plus marqués que ceux décrits dans la littérature quelques semaines ou mois après le début d’un traitement bêtabloquant. D’autres études sur les effets tardifs du carvédilol sur notre population et/ou sur ses effets immédiats sur les autres populations pourront nous aider. Le taux d’intolérance au bêtabloquant est bas. Pourtant, les signes de mauvaise tolérance peuvent être sévères. Ainsi, lors de la première administration de carvédilol, une surveillance médicale reste justifiée. En effet il est difficile de prédire la tolérance à ce  traitement surtout en cas d’insuffisance d’explorations cardiaques et en cas d’état hémodynamique limite.

 
 

Tableau 1

Caractéristiques des patients (N = 66)

 

 

Effectif

Pourcentage

Genre

Masculin

32

48,5

Féminin

34

51,5

Tranche d'âge en années

10-29

11

16,7

30-49

13

19,7

50-69

26

39,4

70 et plus

16

24,2

Ethnie

Antaimoro

  1

  1,5

Antaisaka

  4

  6,1

Antandroy

  2

  3,0

Bara

  1

  1,5

Betsileo

11

16,7

Betsimisaraka

  4

  6,1

Mahafaly

  1

  1,5

Merina

11

16,7

Sakalava

10

15,2

Sihanaka

  1

  1,5

Tsimihety

19

28,8

Indienne

  1

  1,5

Indice de masse corporelle  (classification de Quételet)

Maigre

18

27,3

Normal

33

50,0

Surpoids

11

16,7

Obèse

  4

  6,1

Antécédents*

Diabète

  6

  9,1

Intolérance au bêtabloquant

  0

0

Intolérance à un autre médicament

  4

   6,1

*Pas de bronchopneumopathie chronique ni asthme ni insuffisance rénale ni insuffisance hépatique

 

 

Tableau 2

 Principales caractéristiques initiales des insuffisances cardiaques (N = 66)

 

 

Effectif

Pourcentage

Mode de décompensation cardiaque

Gauche

28

42,4

Globale

38

57,6

Classification de NYHA

NYHA I

31

47,0

NYHA II

35

53,0

Causes de l’insuffisance cardiaque

Hypertensive

18

27,3

Ischémique

16

24,2

Valvulaire

12

18,2

Cardiopathie du péripartum

  8

12,1

Ethylique

  4

  6,1

Mixte

  6

  9,1

Inconnue

 2

  3,0

FEVG

Normale (> 60%)

17

25,8

Préservée (40 - 60%)

27

40,9

Diminuée (< 40%)

19

28,8

Non précisée

  3

  4,5

Troubles de la conduction à l’ECG

Absent

59

89,4

Bloc auriculo-ventriculaire du 1er degré

  1

  1,5

Bloc de branche gauche incomplet

  1

  1,5

Bloc de branche gauche complet

  2

   3,0

Bloc de branche droit incomplet

  3

   4,5

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
 

Tableau 3

Paramètres vitaux de nos patients : comparaison des moyennes pour les séries appariées

par le Test t de Student (N = 66)

 

 

Avant carvédilol

A la 3e heure

Différence

IC 95% de

la différence

p

 

PAS mmHg

    121,95 ± 19,70

   110,65 ± 18,05

11,30 ± 13,30

8,03-14,57

0,000

PAD mmHg

73,91 ± 11,78

69,44 ± 13,55

  4,47 ± 10,08

1,99-6,94

0,001

FC bpm

86,23 ± 18,99

76,70 ± 15,60

9,53 ± 8,26

  7,49-11,56

0,000

FR cpm

       21,86 ± 3,01

     21,42 ±  2,70

0,44 ± 2,24

-0,12-0,99

0,123

 

 

Tableau 4

Association des paramètres avant la prise de carvédilol avec la diminution

de la fréquence cardiaque à la 3e heure par le test de Chi-carré (N = 66)

 

 

Fréquence cardiaque diminuée

p

Genre

Homme : 30 (93,8%)

Femme : 31 (91,2%)

0,693

Age ≤ 55 ans

Oui : 32 (94,1%)

Non : 29 (90,6%)

0,592

Diabète

Oui : 4 (66,7%)

Non : 57 (95,0%)

0,012

Stade de la dyspnée

NYHA I : 31 (100%)

NYHA II : 30 (85,7%)

0,029

Palpitations

Oui : 3 (100%)

Non : 58 (92,1%)

0,612

Mode de décompensation

Gauche : 26 (92,9%)

Global : 35 (92,1%)

0,909

PAS ≤ 120 mmHg

Oui : 32 (91,4%)

Non : 29 (93,5%)

0,745

PAD ≤  75 mmHg

Oui : 31 (88,6%)

Non : 30 (96,8%)

0,209

FC ≤ 85,5 bpm

Oui : 28 (84,8%)

Non : 33 (100%)

0,020

FR ≤ 21,5 cpm

Oui : 29 (87,9%)

Non : 32 (97,0%)

0,163

Cardiomégalie à la radiographie

Oui : 50 (92,6%)

Non : 11 (91,7%)

0,913

FEVG* < 40%

Oui : 17 (89,47%)

Non** : 41 (93,18%)

0,617

*Nombre de patients ayant une FEVG précise : 63

**FEVG ≥ 40% (les FEVG imprécises ne sont pas prise en compte pour ce calcul)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Figure 1 : Diminution de la fréquence cardiaque moyenne (FCM) en fonction du temps

(Avant BB : avant l’administration du bêtabloquant).

 

Figure 2 : Diminution de la pression artérielle systolique moyenne (PASM) en fonction du  temps (Avant BB : avant l’administration du bêtabloquant)

 

 

Figure 3 : Diminution de la pression artérielle diastolique moyenne (PADM) en fonction du temps (Avant BB : avant l’administration du bêtabloquant).

*PAS à 68 mmHg

 

Figure 4 : Effets indésirables apparus au cours de la surveillance

 

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