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Cas Clinique.Dissection coronaire spontanée : Une cause rare d’infarctus du myocarde chez une femme noire africaine.

Clinical Report.Spontaneous coronary artery dissection: A rare case of myocardial infarction in a black African woman.

N’GUETTA R1, YAO H1, NEBIE L2, EKOU A1, ANGORAN I1, KONIN C1,

ANZOUAN-KACOU JB1, ZABSONRE P3, ADOH AM1

RESUME

La dissection spontanée des coronaires est une cause rare d’infarctus du myocarde ou de mort subite, intéressant surtout la femme à partir de la quarantaine. Peu de cas ont été décrits chez le noir africain. Nous rapportons le cas d’une patiente noire africaine, âgée de 56 ans, admise à l’Institut de Cardiologie d’Abidjan pour une coronarographie diagnostique. Elle a présenté quelques semaines plus tôt un infarctus du myocarde antérieur. La coronarographie réalisée a retrouvé une dissection de l’artère interventriculaire antérieure distale. Les artères coronaires étaient normales par ailleurs.

 

Ce cas clinique met en relief la dissection coronaire spontanée comme cause rare mais possible d’infarctus du myocarde dans notre contexte.

MOTS CLES

Dissection coronaire, Infarctus du myocarde, Afrique sub-saharienne.

SUMMARY

Spontaneous coronary artery dissection is a rare cause of myocardial infarction or sudden death, which typically affects young women. We report a case of a 56 years-old black African woman, presented to Abidjan Heart Institute for coronary angiography. She had a few weeks before anterior wall myocardial infarction. Coronary angiography showed spontaneous dissection of distal left anterior descending artery and otherwise normal coronary arteries.

This case report highlights spontaneaous coronary artery dissection as unusual aetiology of acute myocardial infarction in our practice.

KEY WORDS

Spontaneous coronary artery dissection, Acute myocardial infarction, Sub-saharan Africa.

INTRODUCTION

La dissection spontanée des artères coronaires (DSAC) est rare. Elle est retrouvée chez 0,1 à 0,28% des patients présentant un syndrome coronarien aigu, et ayant bénéficié d’une exploration coronarographique [1].

Elle intéresse les sujets jeunes, généralement les femmes dans le contexte de péripartum [2].

Nous rapportons le cas d’une patiente noire africaine, chez qui une DSAC a été identifiée comme étiologie d’un accident coronarien aigu.

1- Institut de Cardiologie d’Abidjan

2- Polyclinique internationale de Ouagadougou

3 -Centre Hospitalier Universitaire Yalgado Ouédraogo, Ouagadougou

Adresse pour correspondance : 

N’Guetta Roland

Institut de Cardiologie d’Abidjan, Côte d’Ivoire.

Adresse : 01 BP V 206 Abidjan, Côte d’Ivoire

Téléphone : + 225 05 96 73 08

Email : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

OBSERVATION

Mme O.D., âgée de 56 ans, sans facteurs de risque cardiovasculaire retrouvés, était admise à la 16ème heure d’un infarctus du myocarde en territoire antérieur non compliqué et non revascularisé dans un centre hospitalier.

Elle était adressée deux semaines plus tard à l’Institut de Cardiologie d’Abidjan pour la réalisation d’une coronarographie diagnostique. La coronarographie réalisée permettait de retrouver une dissection de l’artère interventriculaire antérieure, dans sa partie distale (figure 1). Les coronaires étaient indemnes de lésion par ailleurs.

La DSAC était retenue comme facteur étiologique de cet infarctus du myocarde.

Un traitement médical était institué en première intention, associant acide acétyl salicylique, bêtabloquant et inhibiteur de l’enzyme de conversion. L’évolution était favorable, marquée par une absence de résurgence douloureuse thoracique et de modifications électriques péjoratives. Une coronarographie systématique de contrôle lui est recommandée dans 6 mois.

 

DISCUSSION

La DSAC est un clivage atraumatique de la paroi de l’artère coronaire secondaire à une hémorragie intra murale, avec ou sans déchirure de l’intima, et créant un faux chenal. Cette séparation peut siéger entre l’intima et la média ou entre la média et l’adventice. Depuis le premier cas de DSAC en 1931, de découverte autopsique chez une femme de 42 ans [3], moins de 800 cas ont été rapportés dans la littérature [2]. Très peu de cas ont été décrits en Afrique subsaharienne [4-5].

Environ 70 à 80% des cas de DSAC concernent des sujets de sexe féminin [6] comme dans notre observation. Et parmi cette population, 30% surviendraient dans le péripartum [2], même si des donnés récentes montreraient une diminution de cette prévalence [2,6]. La présentation clinique est très variable : infarctus du myocarde, mort subite ou troubles du rythme ventriculaire [7].

L’artère coronaire la plus souvent atteinte est l’artère interventriculaire antérieure, dans 60% des cas [6,8], comme dans notre observation.

La coronarographie constitue un outil diagnostique de choix. Elle reste encore peu pratiquée en Afrique sub-saharienne, et son accessibilité limitée sont des facteurs qui contribuent à la rareté des cas rapportés dans nos régions. Elle permet de mettre en évidence trois types distincts de DSAC [9]. Dans notre observation, la dissection était en faveur d’un type 1.

L’échographie endocoronaire et la tomographie en cohérence optique sont des outils plus performants dans les pays développés, qui permettent une meilleure évaluation des lésions [10].

L’athérosclérose représente la première étiologie de la DSAC retrouvée dans la littérature [11]. Les étiologies non athéroscléreuses sont représentées essentiellement par des états pathologiques ou physiologiques fragilisant la paroi artérielle, et l’exposant à la dissection : grossesse, dysplasie fibromusculaire, processus inflammatoire systémique, maladies du tissu élastique, traitement hormonal ou cause idiopathique [11]. Ces modifications de la paroi artérielle ne suffisent généralement pas à expliquer la DSAC. Un facteur extrinsèque paraît indispensable, tel un stress émotionnel ou un exercice physique intense, voire une origine médicamenteuse [2].

Le traitement médical constitue le traitement de première intention des DSAC [11]. Dans une cohorte de 168 patients ayant présenté une DSAC, 134 (79,8%) ont bénéficié d’une stratégie thérapeutique conservatrice, avec une mortalité nulle [2]. La réduction du thrombus au niveau du faux chenal par des agents antiagrégants plaquettaires diminuerait la compression sur la vraie lumière artérielle [12]. Les bêta-bloquants, comme dans la dissection aortique, auraient un effet bénéfique en réduisant le stress pariétal.En cas de douleur persistante, de modifications dynamiques à l’électrocardiogramme, ou d’instabilité hémodynamique, une angioplastie coronaire sera réalisée [2]. Le pontage coronaire est préféré en cas d’atteinte du tronc commun.

Yip et al [11]ont répertorié les situations cliniques de patients pouvant conduire à une suspicion de DSAC. Chez notre patiente, le jeune âge, l’absence de facteurs de risque cardiovasculaires classiques, l’absence d’athérome coronaire et l’aspect angiographique de DSAC de type 1 sont les facteurs qui nous on fait retenir une DSAC comme étiologie de son infarctus du myocarde.

CONCLUSION

La dissection coronaire spontanée des artères coronaires est une cause rare d’infarctus du myocarde. Il faut y penser chez une femme jeune, en absence de facteurs de risque cardiovasculaire, surtout dans le péripartum. La réalisation plus large de la coronarographie dans notre contexte devrait permettre de mieux identifier cette cause rare de syndrome coronarien aigu.

 

Figure 4 : Angiographie coronaire gauche en incidence oblique antérieure droite 10° crâniale 40°, montrant la dissection spontanée de l’artère interventriculaire antérieure distale.

REFERENCES

1. Stępień-Wałek A, Wożakowska-Kapłon B. Spontaneous coronary artery dissection as a cause of acute coronary syndrome. Kardiologia Polska 2015; 73(9): 787; DOI: 10.5603/KP.2015.0169

2. Saw J, Aymong E, Sedlak T, et al. Spontaneous coronary artery dissection: association with predisposing arteriopathies and precipitating stressors and cardiovascular outcomes. Circ CardiovascInterv 2014; 7:645-55

3. Pretty H. Dissecting aneurysm of coronary artery in a woman aged 42. BMJ 1931; 1:667

4. Bertrand E, Seka R, Adoh M, N’Dori R,  Odi-Asamoi M, Cailleau G, et al. La dissection coronaire spontanée : à propos d’un cas avec spasme associé et régression de la dissection. Arch Mal Cœur 1993 ; 86(2) : 249-53.

5. Dalby AJ, Levien LJ. Spontaneous coronary artery dissection associated with fibromuscular dysplasia. Cardiovasc J Afr 2015; 26: 86-90.

6. Tweet MS, Hayes SN, Pitta SR, Simari RD, Lerman A, Lennon RJ. Clinical Features, Management, and Prognosis of Spontaneous Coronary Artery Dissection. Circulation 2012;126:579-88

7. Vanzetto G, Berger-Coz E, Barone-Rochette G, Chavanon O, Bouvaist H, Hacini R, et al.Prevalence, therapeutic management and medium-term prognosis of spontaneous coronary artery dissection: results from a database of 11,605 patients. Eur J Cardiothorac Surg. 2009; 35: 250–4.

8. Mokhberi V, Bagheri B, Navidi S, Amini SM. Spontaneous Coronary Artery Dissection: A Case Report. J TehUniv Heart Ctr 2015; 10(3): 159-62.

9. Saw J. Coronary angiogram classification of spontaneous coronary artery dissection. Catheter CardiovascInterv 2014; 84: 1115-22.

10. Porto I, Aurigemma C, Pennestrì F,  Rebuzzi AG.  Intravascular ultrasound-documented healing of spontaneous coronary artery dissection. CircCardiovascInterv 2010; 3: 519-22.

11. Yip A, Saw J. Spontaneous coronary artery dissection—A review. CardiovascDiagnTher 2015;5(1):37-48

Choi JW, Davidson CJ. Spontaneous multivessel coronary artery dissection in a long-distance runner successfully treated with oral antiplatelet therapy. J Invasive Cardiol 2002; 14: 675-8.