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Evaluation de la qualité de l’anticoagulation par les antivitamines K en milieu cardiologique camerounais : étude longitudinale prospective.

 

Quality of anti-coagulation therapy with vitamin K antagonists in Cameroonian cardiology milieu: A prospective longitudinal study.

 

 

CN NGANOU-GNINDJIO1,2, *, D TCHAPMI1, G SADEU WAFEU1, KS CHUISSEUKEPGANG 3, S KINGUE1,4.

 

 

 

RESUME

 

Introduction: Les antivitamines K (AVK) sont des médicaments anticoagulants prescrits pour des pathologies telles que les cardiopathies emboligènes, les valvulopathies avec prothèses valvulaires et la maladie thrombo-embolique veineuse. Ce traitement nécessite une surveillance biologique régulière du niveau de coagulation par l’International Normalized Ratio (INR). L’objectif de cette étude était d’évaluer la qualité biologique (temps en zone thérapeutique ou « time in therapeutic range » ou TTR) et clinique (évènements hémorragiques et ischémiques) de l’anticoagulation des patients par antivitamines K en milieu cardiologique camerounais.

Mééthodologie:Une étude longitudinale observationnelle a été réalisée sur une période de 3 mois dans les services de cardiologie de l’Hôpital Central et de médecine interne de l’Hôpital Général de Yaoundé. Elle a porté sur les patients âgés d’au moins 18 ans, sous-antivitamines K et disposant d’au moins 04 INR calculés pendant la période du suivi. Le TTR a été calculé par la méthode de Rosendaal. Une anticoagulation inadéquate était définie par un TTR < 60% et/ou la survenue d’un évènement ischémique ou hémorragique.

Résultats: Des 63 patients éligibles, 50 étaient inclus. L’âge moyen était de 55,7 ± 17,9 ans. Le sexe ratio H/F était de 0,85. Les cardiopathies emboligènes étaient l’indication la plus fréquente avec 60% des cas. L’INR des patients était dans 52,5% des cas en dehors de la zone thérapeutique (2 – 3). Le pourcentage de TTR moyen était de 52,5 ± 29,4% et 50% des patients avaient un pourcentage de TTR inférieur à 60%. La prise d’AVK pour cardiopathie emboligène était associée significativement à une anticoagulation inadéquate. Une complication (hémorragique ou ischémique) est survenue chez 04 (8%) patients suivis.

Conclusion: : La qualité clinique et biologique de l’anticoagulation reste insuffisante chez les patients prenant des AVK dans notre contexte. L’intensification d’une éducation thérapeutique pourrait être utile afin de  réduire les risques de complications hémorragiques et ischémiques.

 

MOTS CLES

 

Antivitamines K, anticoagulation, TTR, Cameroun

 

 

 

SUMMARY

 

Introduction: Vitamin K antagonists are anticoagulant drugs prescribed for pathologies such as atrial fibrillation, valvopathies with prosthetic heart valves, and thromboembolic diseases. This treatment requires regular biological monitoring by INR (International Normalized Ratio). The objective of this study was to assess the biological (time in therapeutic range or TTR) and clinical (haemorrhagic and ischemic events) quality of anticoagulation therapy with vitamin K antagonists in two cardiology units of Yaoundé.

Methods: We conducted a 3-month observational study in the cardiology department of the Yaoundé Central Hospital and the Internal Medicine department of the Yaoundé General Hospital. It covered patients over the age of 18, on vitamin K antagonists, and with at least 04 INR values calculated during the follow-up period. The TTR was assessed by the Rosendaal linear interpolation method. Inadequate anticoagulation was defined as TTR < 60% and / or the occurrence of a hemorrhagic or ischemic event.

Results: Among the 63 eligible patients,50 were included. The average age was 55.7 ± 17.9 years. The H/F ratio was 0.85. Emboligen heart disease was the most common indication with 60% of cases. The INR patients were in 52.5% of cases outside the therapeutic area. The mean percentage of TTR was 52.5 ±29.4% and 50% of patients had a percentage of TTR below 60%. Taking AVK for emboligen heart disease was significantly associated with poor anticoagulation quality. A complication (haemorrhagic or ischemic) occurred in 04 (8%) patients.

Conclusion: The biological and clinical quality of anticoagulation is poor in patients receiving vitamin K antagonist therapy in our context. More therapeutic patient education may contribute to reduce the risk of haemorrhagic or ischemic complications.

 

 

KEY WORDS

Vitamin K antagonist, anticoagulation, Cameroon

 

 

 

1.Département de médecine interne et des spécialités, Faculté de Médecine et des Sciences Biomédicales, Université de Yaoundé I, Yaoundé, Cameroun.

2.Service de Cardiologie, Hôpital central de Yaoundé, Yaoundé, Cameroun.

3.Faculté des sciences de la santé, Université des Montagnes, Bangangte, Cameroun.

4.Service de Médecine interne, Hôpital général de Yaoundé, Yaoundé, Cameroun.

 

Adresse pour correspondance 

Dr CN Nganou-Gnindjio,

Hôpital Central de Yaoundé

Faculté de Médecine et des Sciences Biomédicales de l’Université de Yaoundé I.

Courriel : This email address is being protected from spambots. You need JavaScript enabled to view it.

Tél : +237 698214610

 

 

 

INTRODUCTION

 

 

Les antivitamines K (AVK) sont des anticoagulants oraux qui inhibent l’action de la vitamine K et entrainent une baisse de la synthèse des facteurs de la coagulation vitamine K dépendants et l’inhibition de la cascade de coagulation. Ils sont indiqués dans plusieurs pathologies cardiaques (troubles de rythme, cardiopathies ischémiques, prothèses valvulaires) et dans la maladie thrombo-embolique veineuse. Leur index thérapeutique étroit est associé au risque élevé d’accidents thrombotiques et hémorragiques. Les AVK entrainent plus de 17000 hospitalisations par an en France [1–3]. Malgré l’émergence des anticoagulants oraux directs qui ont moins de complications hémorragiques que les AVK, avec un risque d’hémorragie intracrânienne réduit de plus de 50%, les AVK restent largement prescrits en traitement de longue durée à cause de leur coût réduit [4,5]. Les patients recevant ce traitement nécessitent une surveillance clinique et biologique régulière, le suivi biologique étant assuré par la mesure de l’International Normalized Ratio (INR) [6,7]. En pratique courante, il est souvent difficile d’obtenir des INR dans la fourchette thérapeutique (INR entre 2 et 3), à cause des interactions médicamenteuses et de la consommation d’aliments riches en vitamine K [8,9]. La qualité de l’anticoagulation peut être mesurée par le temps en zone thérapeutique (TTR), défini par le ratio du nombre de jours pendant lesquels l’INR est dans la zone thérapeutique sur le nombre total de jours du suivi. L’augmentation du TTR réduit significativement le risque de survenue d’accident vasculaire cérébral (AVC) hémorragique et ischémique, d’infarctus du myocarde  et de décès[10].

Certaines études ont montré que la qualité de l’anticoagulation reste faible chez les patients recevant des AVK, le pourcentage de patients traités avec un mauvais contrôle de l’INR allant jusqu’à 92% [11].  Dans une cohorte de patients tunisiens sous dérivés coumariniques au long cours, le pourcentage de TTR était inférieur à 60 % chez 81 % des patients [12]. De même, le pourcentage de TTR moyen était de 48,37% avec 61,3% des valeurs de l’INR en dehors de la zone thérapeutique dans une population camerounaise recevant des AVK[4]. Cependant, les données sur les autres classes d’AVK (dérivés de l’indanedione) sont rares dans la population africaine et la connaissance des facteurs associés au TTR (tel que le coût et la classe d’AVK) reste insuffisante.  L’objectif de cette étude était d’évaluer la qualité biologique (TTR) et clinique (évènements hémorragiques et ischémiques) de l’anticoagulation chez tous les patients recevant un AVK, quel que soit la classe, dans un service de cardiologie et un autre de médecine interne, et d’identifier les facteurs associés à une anticoagulation inadéquate.

 

 

 

METHODE

 

Population et type d’étude

 

Nous avons mené de Janvier 2018 à Juin 2018 une étude longitudinale prospective dans le service de cardiologie de l’Hôpital central de Yaoundé et le service de médecine interne de l’Hôpital général de Yaoundé. Ont été inclus tous les patients âgés d’au moins 18 ans, hospitalisés ou vus en consultation externe et sous traitement AVK quel que soit l’indication.  La qualité clinique et biologique de l’anticoagulation était alors évaluée sur une période d’au moins 03 mois. Les critères d’exclusion étaient la perte de vue du patient ou la réalisation de moins de 4 examens de temps de prothrombine (TP) et/ou INR au cours du suivi.

 

Collecte des données

 

Des autorisations de recherche ont été obtenues auprès des directions respectives de l’Hôpital Central de Yaoundé et de l’hôpital General de Yaoundé, ainsi qu’auprès du comité institutionnel d’éthique de l’Université des Montagnes. Les patients sous AVK et suivis dans les services choisis étaient inclus après obtention de leur consentement libre et éclairé. Le traitement était prescrit au patient par le cardiologue, de manière habituelle et indépendamment de l´éventuelle participation à l´étude.  Les données étaient collectées à partir de l’interrogatoire du patient et de son dossier médical, grâce à un questionnaire structuré pré-testé. Il s’agissait des données sociodémographiques, des comorbidités et autres traitements en cours, de l’indication de l’anticoagulation, la classe d’AVK prescrite et le coût mensuel du traitement (incluant le coût du médicament et du dosage de l’INR), des valeurs de l’INR calculées pendant la période de suivi avec les dates correspondantes de ces valeurs, et des évènements ischémiques ou hémorragiques survenus au cours du suivi. L’étude a été menée suivant les principes éthiques applicables à la recherche médicale impliquant des êtres humains tel que décrit dans la déclaration d’Helsinki et ses mises à jour ultérieures [13].

 

Estimation du TP / INR et calcul du TTR

 

Le prélèvement sanguin se faisait par ponction veineuse de l’avant-bras, et l’échantillon était collecté dans un tube contenant du citrate de sodium à 3,2%, puis analysé dans un délai de deux heures. L’INR était calculé par la formule : INR =  TP patient  / TP contrôle [14]. L’Indice de Sensibilité International (ISI) était égal à 1,62 et était recalculé à chaque changement de lot. La thromboplastine utilisée était la thromboplastine recombinante. Le TTR était calculé par la méthode de Rosendaal qui suppose une variation linéaire du TP / INR entre deux contrôles consécutifs [15]. Le calcul du TTR était fait par interpolation et, une anticoagulation adéquate, était définie par un pourcentage de TTR > 60%  [16].

 

Analyse statistique

 

Les données ont été analysées avec le logiciel SPSS 20.0. Les résultats ont été exprimés en fréquences et pourcentages pour les variables qualitatives. Les données quantitatives normalement distribuées étaient décrites par la moyenne ± écart-type et les données asymétriques par la médiane (intervalle interquartile). Les moyennes ont été comparées grâce au test t de Student pour échantillons indépendants. Le test de chi carré ou le test exact de Fisher ont été utilisés pour la recherche des facteurs associés à une bonne anticoagulation, avec un seuil de significativité fixé à 5%. La taille minimale de l’échantillon a été estimée à 365 valeurs de l’INR grâce à la formule de la taille de l’échantillon pour l’estimation de proportion dans une population avec une erreur alpha de 5%, un niveau de précision de 5 % et une prévalence estimée de 61,3% des valeurs de l’INR en dehors de la zone thérapeutique [4,17].

 

 

RESULTATS

 

Description de la population d’étude

 

Au terme de la sélection, 50 patients ont été recrutés et 54% d’entre eux étaient de sexe féminin. Leur âge moyen était de 55,7 ± 17,9 ans. Les tableaux 1 et 2présentent les caractéristiques socio démographiques et cliniques des patients selon le sexe. L’indication la plus fréquente du traitement par AVK était la cardiopathie emboligène retrouvée chez 19 participants (63,3%).

Description de la qualité de l’anticoagulation

L’acénocoumarol était l’AVK le plus fréquent, retrouvé chez 35 patients (70%) tandis que les 15 autres (30%) recevaient de la fluindione. La durée totale de suivi des patients était de 2997 personnes-jours et le nombre total de jours dans la fourchette thérapeutique de l’INR était de 1807 personnes-jours, soit un pourcentage brut TTR de 60,3%. Au cours du suivi, l’INR a été calculé pour 200 échantillons au total avec une durée moyenne de 25,5 ± 16,5 jours entre deux valeurs, parmi lesquelles 95 (47,5%) étaient comprises entre 2 et 3. La figure 1 décrit la distribution des valeurs de TP/INR au cours du suivi. Le pourcentage de TTR moyen était de 52,5 ±29,4%, et la moitié des participants avaient un TTR ≤ 60% au cours du suivi (Tableau 3).  

 

Facteurs associés à la qualité de l’anticoagulation

 

La qualité de l’anticoagulation était meilleure chez les patients dont le coût mensuel du traitement était ≥ 15 000FCFA (» 27 USD) (p = 0.023), de même que chez ceux dont le traitement par AVK était indiqué pour la maladie thromboembolique veineuse (p = 0.024). La proportion des patients ayant une anticoagulation inadéquate était significativement plus élevée chez les patients dont l’indication était une cardiopathie emboligène (p = 0.021). Il n’y avait pas d’association significative entre la classe d’AVK et la qualité de l’anticoagulation (Tableau 4).

 

Complications au cours du traitement

 

Des accidents hémorragiques ont été relevés chez deux patientes (4%), sous la forme d’épistaxis et d’hématomes cutanés.  Ces patientes respectivement de 40 ans et 86 ans prenaient des AINS en raison des douleurs articulaires. Par ailleurs, deux patientes (4%) de notre cohorte ont présenté un AVC ischémique après interruption du traitement sans avis médical. Il n’y avait pas d’association significative entre ces complications et la qualité de l’anticoagulation (p > 0.05).

 

 

 

DISCUSSION

 

L’objectif de notre étude était d’évaluer la qualité du traitement anticoagulant des patients suivis dans 2 hôpitaux de la ville de Yaoundé au Cameroun.  Dans notre population d’étude, la cardiopathie emboligène était l’indication la plus fréquente des AVK. Au plan biologique, 52,5% des INR étaient en dehors de la fourchette thérapeutique et 50% des patients avaient un TTR inférieur à 60%. Cette proportion de patients avec une anticoagulation inadéquate était inférieure au 78,1% retrouvé par Ouali et al. en Tunisie, et à 89% retrouvé par Coulibaly et al. en Côte d’ivoire [18,19]. Cette différence pourrait s’expliquer premièrement par le fait que le suivi des patients était plus long (plus de 06 mois) dans ces deux études, ce qui serait associé à une plus mauvaise observance de la prise d’AVK et par conséquent une anticoagulation inadéquate. Aussi, nous avons utilisé une limite de 60% du TTR tandis que ces auteurs ont utilisés une limite de 65%.  Le TTR est une mesure objective de la qualité du traitement anticoagulant d’un patient. Une valeur supérieure à 60% est associée à une anticoagulation adéquate et une réduction de la morbidité et la mortalité[15,20]. Le TTR moyen par patient était de 52,5 ±29,4%, résultat similaire à celui retrouvé par Menanga et al. en 2014 dans une population camerounaise recevant des AVK (l’acénocoumarol et la fluindione) au long cours, où le TTR moyen était de 48,37% [4]. Cette qualité moyenne d’anticoagulation reste inférieure aux valeurs recommandées  (TTR > 60 - 70%), traduisant ainsi le risque élevé de complications observées  chez les patients sous AVK dans notre contexte [16,21]. C’est ainsi que 04 patientes ont présenté des complications dont 02 hémorragiques et 02 ischémiques, bien qu’il n’y avait pas d’association significative entre ces complications et la qualité de l’anticoagulation. Coulibaly et al. dans leur population ivoirienne ont rapporté un résultat similaire, avec 3% de complications hémorragiques et 3% de complications ischémiques. La qualité de l’anticoagulation des patients traités par AVK pourrait être optimisé par des mesures plus fréquentes de l’INR et l’intensification de l’éducation thérapeutique des patients sur les risques liés à un mauvais suivi et une faible observance. C’est ainsi que les patients ayant un coût de traitement ≥ 15 000 FCFA (traduisant un nombre plus élevé d’INR et plus de médicaments achetés) avaient une meilleure qualité d’anticoagulation. Le calcul de l’INR était fait en moyenne après 25 jours dans notre population, ce qui est plus long que le délai de 02 - 03 semaines recommandé par certains auteurs [22]. L’une des raisons expliquant cette fréquence de réalisation de l’INR pourrait être le coût élevé de cet examen dans notre contexte de revenu faible des patients.

La qualité de l’anticoagulation des patients recevant les dérivés de l’indanedione était similaire à celle des patients recevant les dérivés coumariniques. Ce résultat est similaire à celui retrouvé par Kirchhof et al. dans une étude menée dans les pays européens, où le pourcentage de patients ayant les trois derniers INR dans la fourchette thérapeutique était similaire entre ceux recevant l’acénocoumarol (36%) et ceux recevant la fluindione (38%) [23]. Ceci pourrait s’expliquer par le fait que ces deux classes d’AVK ont le même mécanisme d’action ; la variation de la qualité de l’anticoagulation serait donc liée à d’autres facteurs qu’à la classe de l’AVK utilisée.

Dans notre étude, 26 (52%) patients disaient avoir reçu une éducation thérapeutique individuelle sur leur traitement. Ce résultat est comparable à celui retrouvé par Samadoulougou et al. au Burkina Faso, qui a noté que 49% des patients déclaraient avoir reçu des informations de la part de leur médecin[24]. Il serait donc important de former davantage les praticiens à l’éducation thérapeutique des patients et à renforcer l’éducation des patients recevant les AVK dans notre contexte, en mettant en exergue les risques liés aux interactions médicamenteuses. Les deux patientes qui ont présentées des hémorragies spontanées étaient sous anti-inflammatoires non stéroïdiens.

L’anticoagulation inadéquate était significativement associée aux cardiopathies emboligènes. Chez les patients ayant cette indication, seuls 36,7% des patients avaient un pourcentage de TTR > 60%. Ce résultat pourrait s’expliquer par le fait que ces pathologies sont plus fréquentes chez les personnes âgées, l’âge étant associé à un oubli et une mauvaise observance du traitement par AVK, et par conséquent à une mauvaise qualité de l’anticoagulation [25]. L’éducation thérapeutique devrait donc être renforcée chez les patients dont l’indication du traitement par AVK est une cardiopathie emboligène. Les anticoagulants oraux directs constitueraient une alternative, mais leur coût élevé pourrait limiter leur utilisation.

 

 

LIMITES DE L'ETUDE

 

 

La principale limite de notre étude est la faible taille de l’échantillon, qui aboutit à une faible puissance des tests statistiques réalisés, réduisant ainsi la probabilité de détecter des différences significatives qui existent dans la population. Une autre limite concerne l’observance des patients qui n’a pas été évaluée de manière objective. Certaines variations de l’INR pourraient ainsi être liées à une mauvaise observance médicamenteuse. Néanmoins, ce résultat reflète ce qui est rencontré en pratique courante. Par ailleurs, le contrôle de l’INR n’était pas fait à une fréquence régulière et fixe chez tous les patients.

 

 

CONCLUSION

 

La qualité de l’anticoagulation chez les patients prenant des AVK dans notre population est insuffisante, et s’accompagne de complications (hémorragique ou ischémique) liées à la mauvaise observance thérapeutique et aux interactions médicamenteuses chez 08% des patients. La mauvaise qualité de l’anticoagulation était associée significativement aux cardiopathies emboligènes. Une éducation thérapeutique des patients sous AVK est une nécessité dans notre contexte.

 
 

Tableau 1

Caractéristiques socio démographiques de la population d’étude

 

Variables

Total

N=50

Masculin

N=23

Féminin

N=27

Valeur p

Age (années), moyenne ± ET

55,7 ± 17,9

60,0 ± 12,2

52,0 ± 21,2

0,117

Niveau d’étude

 

 

 

0,075

   Aucun / primaire

28 (56)

16 (69,6)

12 (44,4)

 

   Secondaire / supérieur

22 (44)

7 (30,4)

15 (55,6)

 

Statut matrimonial

 

 

 

0,009

   Célibataire / Divorcé / Veuf

23 (46)

6 (26,1)

17 (63)

 

   Marié

27 (54)

17 (73,9)

10 (37)

 

Profession

 

 

 

0,340

   Emploi rémunéré

21 (42)

8 (34,8)

13 (48,1)

 

   Sans emploi

29 (58)

15 (65,2)

14 (51,9)

 

Groupe ethnique

 

 

 

0,464

   Bantou

24 (48)

12 (52,2)

12 (44,4)

 

   Semi-bantou

21 (42)

10 (43,5)

11 (40,7)

 

   Soudanais

5 (10)

1 (4,3)

4 (14,8)

 

                                                        ET : Ecart-type ; p significatif < 0,05

 

Tableau 2

Caractéristiques cliniques et biologiques de la population d’étude

 

Variables

Total

N=50

Masculin

N=23

Féminin

N=27

Valeur p

Classe d’anticoagulant

 

 

 

0,577

   Acénocoumarol

35 (70)

17 (73,9)

18 (66,7)

 

   Fluindione

15 (30)

6 (26,1)

9 (33,3)

 

Coût mensuel du traitement

 

 

 

0,479

   ≥ 15 000

9 (18)

3 (13)

6 (22,2)

 

   < 15 000

41 (82)

20 (87)

21 (77,8)

 

Indication du traitement

 

 

 

 

   Cardiopathie emboligène

30 (60)

14 (60,9)

16 (59,3)

0,908

   Prothèse valvulaire

7 (14)

1 (4,3)

6 (22,2)

0,107

   Maladie veineuse thrombo-embolique

13 (26)

8 (34,8)

5 (18,5)

0,191

Pathologies associées

 

 

 

 

   Insuffisance cardiaque

24 (48)

11 (47,8)

13 (48,1)

0,982

   Hypertension artérielle

10 (20)

7 (30,4)

3 (11,1)

0,155

   Diabète

2 (4)

2 (8,7)

0 (0)

0,207

   Antécédent d’AVC

4 (8)

3 (13)

1 (3,7)

0,322

TTR (jours), moyenne ± ET

20,0 ± 8,9

19,3 ± 8,0

20,6 ± 9,8

0,612

Education thérapeutique

26 (52)

13 (56,5)

13 (48,1)

0,555

 

 

                               15 000 FCFA»27 USD; AVC : Accident Vasculaire Cérébral, ET : Ecart-type ; INR : Index Normalized Ratio ;

                               TTR = Time in therapeutic range ou temps en zone thérapeutique ; p significatif < 0,05

 

 

 

 
 

Tableau 3 

Description du TP/INR et du TTR de la population d’étude

 

Variables

Paramètres

TP/INR, médiane [IIQ]

2,2 [1,7 – 2,7]

Intervalle INR, n (%)

 

   < 2

71 (35,5)

   2 - 3

95 (47,5)

   > 3

34 (17,0)

TTR, médiane [IIQ]

60,3 [34,8 – 79,2]

Catégories TTR, n (%)

 

   TTR > 60%

25 (50)

   TTR ≤ 60%

25 (50)

                                                                IIQ: Intervalle Interquartile; INR: Index Normalized Ratio, TTR: Time in Therapeutic Range

 

 

Tableau 4

Facteurs associés à la qualité de l’anticoagulation

 

Variables

Qualité de l’anticoagulation

RR (IC à 95%)

Valeur p

Inadéquate

Adéquate

Age (années), moyenne ± ET

58,04 ± 19,1

53,3 ± 16,7

/

0,358

Sexe

 

 

 

 

   Masculin

11 (47,8)

12 (52,2)

0,9 (0,5 – 1,6)

0,777

   Féminin

14 (51,9)

13 (48,1)

1

1

Niveau d’étude

 

 

 

 

   Aucun / primaire

11 (50)

11 (50)

1,0 (0,3 – 3,1)

1,000

   Secondaire / supérieur

14 (50)

14 (50)

1

1

Classe d’anticoagulant

 

 

 

 

   Acénocoumarol

19 (54,3)

16 (45,7)

1,4 (0,7 – 2,7)

0,355

   Fluindione

6 (40)

9 (60)

1

1

Coût mensuel du traitement

 

 

 

 

   ≥ 15 000 FCFA

1 (11,1)

8 (88,9)

0,2 (0,03 – 0,8)

0,023

   < 15 000 FCFA

24 (58,5)

17 (41,5)

1

1

Indication du traitement

 

 

 

 

   Cardiopathie emboligène

19 (63,3)

11 (36,7)

2,1 (1,02 – 4,3)

0,021

   Prothèse valvulaire

3 (42,9)

4 (57,1)

0,8 (0,3 – 2,1)

1,000

   Maladie thrombo embolique veineuse

3 (23,1)

10 (76,9)

0,4 (0,1 – 0,9)

0,024

Pathologies associées

 

 

 

 

   Insuffisance cardiaque

13 (54,2)

11 (45,8)

1,2 (0,7 – 2,0)

0,271

   Hypertension artérielle

5 (50)

5 (50)

1,0 (0,5 – 2,0)

1,000

   Diabète

1 (50)

1 (50)

1,0 (0,06 – 16,9)

1,000

   Antécédent d’AVC

3 (75)

1 (25)

1,6 (0,8 – 2,9)

0,609

Education thérapeutique

13 (50)

13 (50)

1,0 (0,57 – 1,7)

1,000

                  15000 F CFA » 27 USD; AVC : Accident Vasculaire Cérébral, ET : Ecart-type ; RR : Risque relatif

 

 

 

 

REFERENCES

 

1. Ageno W, Gallus AS, Wittkowsky A, Crowther M, Hylek EM, Palareti G. Oral anticoagulant therapy: antithrombotic therapy and prevention of thrombosis: American College of Chest Physicians evidence-based clinical practice guidelines. CHEST J. 2012;141(2):44–88.

2. Holbrook AM, Pereira JA, Labiris R, McDonald H, Douketis JD, Crowther M, et al. Systematic overview of warfarin and its drug and food interactions. Arch Intern Med. 2005;165(10):1095–106.

3. Pouyanne P, Haramburu F, Imbs JL, Bégaud B. Admissions to hospital caused by adverse drug reactions: cross sectional incidence study. Bmj. 2000 ; 320(7241):1036.

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